Juliette Fischbacher

En août 1942, la préfecture des Hautes-Alpes établit une liste des "israélites étrangers à regrouper". Parmi les 43 patronymes recensés 33 sont pensionnaires du Lastic.
L'abbé Alexandre Glasberg*, au courant de l'imminence des rafles, va déployer une énergie considérable pour sauver ses protégés.
Il se rend à Rosans, probablement le 17 août, puis en compagnie de Jules Gueydan, il rencontre le préfet.
Invoquant le haut-patronage du cardinal Pierre-Marie Gerlier*, ils lui demandent de rayer ces jeunes aides agricoles des listes de déportation. Le préfet convaincu accepte, mais il doit en référer au préfet de région, responsable des "opérations de regroupement des juifs étrangers".
Or, ce dernier va exiger l'application des ordres et les arrestations immédiates.

Le 19 août au soir, Théo Bernheim reçoit un télégramme lui demandant de se présenter le lendemain matin à la gendarmerie d'Aspres-sur-Buëch, accompagné des 9 travailleurs étrangers adultes, pour "un déplacement de courte durée" dont l'issue ne leur est pas précisée.
Trois d'entre eux trouveront un prétexte pour ne pas s'y rendre et disparaissent.

A leur arrivée à Aspres, les six autres apprennent avec effroi leur départ pour Livron, d'où un convoi les conduira à Paris. Autorisés à récupérer leurs bagages au Lastic, ils parviennent à s'évader en sautant le camionnette qui les transporte.
Les brigades de gendarmerie de la région se lancent aussitôt à leur recherche, mais seuls deux d'entre eux seront arrêtés le lendemain à Nyons. Un autre infortuné jeune homme, échappé du camp de Rivesaltes pour rejoindre un ami au Lastic, sera lui aussi arrêté. Les autres trouvent refuge dans la région grâce aux réseaux d'Arnaud et de Gueydan. M. Laurent, le zélé commandant du GTE, furieux de cet échec, va diriger un "véritable siège du centre" pour prévenir toute tentative de fuite.

Le 24 août, la préfecture de région ordonne de "libérer totalement notre région de tous les juifs étrangers".

Lien vers le Comité français pour Yad Vashem