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Région :
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Préfets :
Marcel Ribière
(1940 - 1943) Marcel Julien Henri Ribière, Préfet de la région de Marseille (Alpes-Maritimes, Basses-Alpes (Alpes-de-Haute-Provence), Bouches-du-Rhône, Corse, Gard, Hautes-Alpes, Var et le Vaucluse) (1892-1986)
Max Bonafous
(1941 - 1942) Préfet des Bouches-du-Rhône (1900-1975)
Adelin Rivalland
(1942 - 1943) Adelin Pascal Jean Joseph Rivalland (1893-1965)
Antoine Lemoine
(1943 - 1944) Antoine Jean Marcel Lemoine, Préfet des Bouches-du-Rhône
Jacques Bussière
(1944 - 1944) Jacques Félix Bussière, Préfet des Bouches-du-Rhône. Arrêté, interné au camp de Compiègne puis déporté en Allemagne, il mourra en déportation (1895-1945)
Émile Malican
(1944 - 1944) Émile Gabriel Louis Marie Malican, Préfet des Bouches-du-Rhône
(Mai 1943 - Mai 1944) Marie Joseph Jean Chaigneau, Préfet de la région de Marseille (Alpes-Maritimes, Basses-Alpes (Alpes-de-Haute-Provence), Bouches-du-Rhône, Corse, Gard, Hautes-Alpes, Var et le Vaucluse). Arrêté en mai 1944 par les Allemands, il est déporté au camp d'Eisenberg Raymond Aubrac
(1944 - 1945) Raymond Aubrac, de son vrai nom Raymond Samuel, Commissaire de la République de la région de Marseille (Alpes-Maritimes, Basses-Alpes (Alpes-de-Haute-Provence), Bouches-du-Rhône, Corse, Gard, Hautes-Alpes, Var et le Vaucluse) (1914)
Paul Haag
(1945 - 1946) Paul Maurice Louis Haag, Commissaire de la République de la région de Marseille (Alpes-Maritimes, Basses-Alpes (Alpes-de-Haute-Provence), Bouches-du-Rhône, Corse, Gard, Hautes-Alpes, Var et le Vaucluse) (1891-1976)
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UGIF
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rue de la Rose
durant la Seconde Guerre mondiale (WWII) |
Texte pour ecartement lateralCommune : 13000 Marseille (La Millière) Sous-préfecture : Marseille |
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La maison de la Verdière : une halte précaire
À la demande de l’UGIF de Marseille, Alice Salomon prit la direction de la Maison de la Verdière aidée de Claude Lehmann, jeune étudiant en médecine.
L’organisation
Les mères et enfants « libérés » par les autorités allemandes et confiés aux soins de l’UGIF se sentaient en sécurité à la Verdière et y séjournaient dans des conditions confortables et sereines. L’UGIF s’était attachée dès le départ, à résoudre les difficultés essentielles concernant le ravitaillement. Elle avait obtenu, au prix de nombreuses démarches auprès des autorités préfectorales et municipales, la régularisation administrative des assistés, lorsque les cartes d’identité et d’alimentation avaient été égarées ou conservées lors des arrestations. Il avait fallu aussi effectuer divers travaux nécessaires à la bonne installation des familles.1
Le 11 juin 1943 Alice Salomon décrivit ainsi leur arrivée :
« après un bref séjour à la Maison de la Clue, elles sont arrivées à la Rose par le tramway qui s’arrête à la porte même de la maison, un camion ayant été mis le matin même à leur disposition pour le transport de leurs bagages. Elles furent installées aussitôt dans les chambres de cet hôtel, le nombre des chambres variant pour chaque mère suivant le nombre de leurs enfants.
Peu à peu l’organisation s’est précisée sans qu’aucun incident notable n’en vienne troubler le cours. Les pensionnaires sont absolument libres de sortir en ville quand il leur plaît, sauf à l’heure des repas et elles doivent obligatoirement passer la nuit à la Verdière. Dans le but de fournir une occupation à ces mères et aussi pour soulager un peu le personnel de l’hôtel, j’ai institué un tableau de service, affiché tous les dimanches, par lequel sont désignées à tour de rôle deux femmes, qui, chaque jour, sont chargées de divers travaux de ménage (entretien, vaisselle, épluchage de légumes....).
Quant aux enfants, ils ont, tout comme leur maman, un grand parc autour de la maison où des jeux sont organisés sous la surveillance d’une jeune pensionnaire de 17 ans. J’ai fait dès mon arrivée, couvrir par une barrière grillagée un ruisseau ainsi que l’accès des machines électropompes, qui auraient pu constituer un danger grave pour les enfants. La jeune monitrice se charge également de rassembler chaque après-midi les enfants en vue de leur faire faire la sieste jusqu’à environ 16 heures. Afin que les enfants ne manquent de rien, j’ai pu leur fournir grâce à l’appui et à la générosité de quelques amis personnels, un lot complet de vêtements neufs de toutes sortes, de telle façon que tous les enfants sont presque entièrement vêtus par mes soins, à la grande joie des mères. Nous avons de plus engagé le docteur Aboukaya qui doit se charger de la surveillance médicale de la maison et également y passer la nuit, il est là la nuit et la matinée jusqu’à midi, il veille à l’état sanitaire et à l’hygiène de chaque enfant et de la mère. Les conditions hygiéniques sont entièrement satisfaisantes, chaque chambre étant pourvue d’un lavabo à eau courante et un lavoir est mis à la disposition des mères pour faire leur lessive.
Étant donné que s’annonce la période des vacances, je n’ai prévu que deux heures d’instruction par jour, une heure le matin, une heure l’après-midi, dont ont bien voulu se charger deux personnes ayant un degré d’instruction suffisant. Au point de vue ravitaillement, il a fallu quelques jours pour se rendre compte des défections existantes et il y a été remédié en peu de temps. À présent, j’ai pu faire rétablir toutes les cartes d’alimentation et carnets d’inscription ; l’hôtelier a vu sa répartition très augmentée après nos différentes démarches. Je peux de plus faire goûter chaque enfant, en supplément de ce que la maman peut donner grâce à des générosités amies. Le régime est le même pour tous : il n’y a pas de différence quelque peut-être ou a pu être la situation antérieure. Si une maman privilégiée a le bonheur de pouvoir nourrir mieux son enfant, il ne faut pas que les autres regardent d’un œil d’envie ce qu’ils ne peuvent pas avoir. Aussi, chaque maman a une lampe à alcool et l’alcool nécessaire, grâce à quoi elles peuvent faire cuire tout ce qu’elles veulent dans une de leurs chambres. Les menus se composent généralement : d’un potage épais, un plat de légumes, un plat de pâtes ou pommes de terre ou viande, fromage ou pâte de fruits, boisson (bière ou vin) comprise.
Aujourd’hui après bientôt trois semaines de fonctionnement, nous pouvons nous montrer satisfaits, chaque jour amenant un nouveau progrès dans notre organisation. Marseille, le 11 juin 1943 ».2
Les visites et l’ambiance
De retour à Marseille, après quelques mois passés à Saint-Martin-Vésubie, cachée par l’OSE, Mauricette Labos Ben Dayan allait très souvent à la Rose :
« J’y passais mes journées. Je mangeais avec ma mère et mes frères et sœurs. Tout le monde s’entendait bien et l’ambiance était confiante et détendue. Les familles s’installaient dans le parc bien entretenu et bavardaient. Marie Kaddouche était une amie charmante et très gaie. Nous lui racontions nos petites histoires d’adolescentes et elle prenait toujours notre parti contre notre mère plus sévère à cet égard. Nous nous rendions chaque semaine au bain turc. La seule contrainte était de revenir le soir afin qu’il y ait le compte de pensionnaires. Maman ne voulait pas que je dorme avec elle là-bas. Je rentrais donc, rue Bernard Dubois, chez ma tante paternelle pour la nuit et j’y retournais chaque matin ».
Myriam et Emma Chicheportiche rendirent plusieurs fois visite à leur mère :
« Nous allions souvent la voir. Nous prenions le tram qui nous conduisait de chez nous (48, rue Kruger aux Chartreux) à la Rose. Ma mère pouvait sortir aussi. Elle nous mena chez la couturière pour nous confectionner des vêtements avant de repartir à Grenoble pour Emma, et en Ardèche pour moi. Nous avons même couché une nuit avec elle entre le 3 et le 5 octobre 1943. La famille était regroupée dans une même chambre. C’était la veille d’une fête juive. Elle avait fait des gâteaux et même le pain. Nous ne nous souvenons pas des détails ni de l’organisation intérieure. Le lendemain, elle nous a demandé de ramener à la maison les vêtements d’été de nos petits frères et sœurs et de lui rapporter les habits chauds pour l’hiver ».
Jeannette Cohen déclare à propos de Serge De Minden :
« Lors de ma visite, début octobre, j’ai trouvé une ambiance chaleureuse. Les familles confectionnaient des gâteaux pour la préparation d’une fête et les enfants jouaient. Madame Tordjman avait amené Serge avec elle lors d’une des visites à son mari sur le port. Elle lui avait prêté le manteau d’un de ses enfants car il était arrivé à la Verdière sans aucun effet personnel ».
Cette ambiance chaleureuse était entretenue par les soins d’Alice Salomon comme le montre le déroulement de la fête des mères au Château de la Verdière, le dimanche 30 mai.
« Il convenait de fêter dignement les mères israélites hébergées au Château de la Verdière, toutes mères de famille nombreuse. Dès la veille, chaque enfant avait reçu un petit pantalon de jardinier en toile bleue, un chandail, une paire d’espadrilles, le tout entièrement neuf provenant de dons qui m’avaient été faits par des amis personnels. Le dimanche matin, des jouets étaient également distribués aux enfants (toupies, autos, dominos, etc.) mais c’est à midi que la fête avait réellement lieu. Les tables étaient toutes fleuries de roses blanches et roses, et devaient voir se succéder : radis, pâtes au jus, rôti de veau, petit pois à la française, pâte de fruits et gâteaux, le tout arrosé de vin et de bière, et suivi de café. Auparavant, une double surprise était réservée aux héroïnes de la journée, aidés par une jeune pensionnaire de 17 ans, tous les enfants en cortège et par rang de taille, chacun un bouquet à la main, faisaient une entrée émouvante dans la salle à manger récitant en chœur un compliment et remettaient gaiement les fleurs à leur mère, tandis que j’offrais moi-même à chacune d’elles une enveloppe contenant 200 francs (provenant également de dons amicaux). Je crois inutile d’ajouter que nulle d’entre elles ne put retenir ses larmes – pas plus d’ailleurs que moi-même. À l’heure du goûter de nouveaux gâteaux étaient offerts aux enfants et à leur maman. La journée se termine dans une ambiance aussi familiale que possible et j’avais le plaisir de constater que ce jour-là comme les autres, mes efforts n’avaient pas été vains pour adoucir le plus possible les conditions de vie de ces familles provisoirement éloignées de leur foyer ».3
Les soins médicaux et l’état de santé des enfants
Les soins médicaux étaient réguliers. Lors de son inspection de la Verdière le 13 juillet 1943, le Docteur Lévy établit un rapport moins optimiste que celui d’Alice Salomon émis deux mois plus tôt, le 11 juin 1943, au niveau de l’hygiène et des conditions alimentaires. Il estima la maison bien située pour héberger des enfants, le jardin assez spacieux et la maison confortable et de bonnes conditions d’hygiène : eau dans chaque pièce, WC en ordre et en nombre à peu près suffisants.
« Mais », fit-il remarquer, « le propriétaire habite la maison et ne donne pas sa salle de bain. Une douche à eau chaude et eau froide a été installée dans une petite pièce chauffée. Et malgré le nombre restreint des chambres, le n° 16 a été désigné comme chambre d’isolement servant à la fois à un enfant devant être subitement isolé pour raison de maladie ou à un enfant entrant qui devait être isolé jusqu’à l’examen par un médecin de l’établissement.
Le personnel a été augmenté d’une surveillante d’enfants, Madame Cahn et d’une surveillante infirmière, Mlle Cerf, qui est aussi monitrice de culture physique. Le service médical assuré par le docteur Aboukaya, l’a été, à partir de juillet, par le docteur Paul Weil. Le médecin doit se rendre dans l’établissement tous les quatre ou cinq jours. Le professeur Cassoute, pédiatre marseillais, retraité, a fourni son concours comme consultant.
Au niveau de l’alimentation et de l’hygiène, il y avait quelques difficultés. Il faut augmenter l’ordinaire de la maison, mais ce sera difficile à cause des circonstances locales de Marseille. Il faut mettre à contribution le Secours National et l’Hygiène Départementale. Les rations sont suffisantes et la préparation culinaire bonne. C’est surtout la ration d’albumine qui est très faible, manque de viande, d’œufs, de poisson. Il faut que le médecin de l’établissement ordonne de la suralimentation pour les enfants et les mères dont l’état physique l’exige.
L’état de santé des enfants semble très satisfaisant malgré des retards de poids et de taille qui sont le résultat de privations antérieures et il y a un grand nombre de lésions de peau (impétigo). La plupart des enfants sont vaccinés contre la variole, le tétanos et la diphtérie. Les autres le seront ».4
Les projets éducatifs
Dans son rapport, le Docteur Lévy s’inquiétait aussi du peu d’organisation pour l’éducation des enfants. Il souhaitait qu’une personne qualifiée s’occupe de l’instruction des enfants de 8 à 13 ans, demandait qu’un programme quotidien soit établi pour retirer les enfants de la trop grande influence maternelle et qu’ils soient regroupés sous la tutelle des éducatrices et monitrices qui assumeraient leur éducation. La culture physique était pratiquée sous la direction de Claude Lehmann, assistant médical à la Verdière.
Source : HAZZAN, Suzette. La maison de la Verdière à La Rose : d’une halte précaire à la déportation des enfants et des mères In : Provence-Auschwitz : De l'internement des étrangers à la déportation des juifs 1939-1944 [en ligne]. Aix-en-Provence : Presses universitaires de Provence, 2007 (généré le 26 septembre 2018). Disponible sur Internet :
27/09/2018
Auteur : Robert Mencherini
Lien : Provence-Auschwitz
La rafle du 20 octobre 1943
Le 20 octobre 1943, tous les pensionnaires, trente enfants juifs et quatorze adultes dont neuf mères furent déportés et conduits à Drancy puis à Auschwitz. Une autre famille fut déportée en décembre 1943.
Depuis novembre 1942, la situation avait changé en zone sud et l’étau se refermait. La Gestapo remarqua rapidement que l’UGIF et ses œuvres s’orientaient de plus en plus vers des activités clandestines sous le couvert de la façade officielle. Les brimades de la Gestapo s’accentuèrent, entraînant perquisitions et arrestations très nombreuses. Les Allemands n’hésitèrent pas à faire arrêter et déporter ses dirigeants estimés trop rebelles. Raymond-Raoul Lambert fut arrêté le 20 août 43 avec sa femme et ses quatre enfants et déporté à Auschwitz comme André Baur en zone nord. Il fut alors remplacé par Gaston Kahn.
Il semble qu’il y ait eu des désaccords de fond entre les « notables » de l’UGIF de Marseille à propos de l’évacuation préventive des enfants et de leur mère. La liste des pensionnaires remise aux autorités allemandes, le 18 octobre 1943, deux jours avant la déportation, constituait un avertissement évident. Alice Salomon et Maurice Brener semblent avoir suggéré l’idée d’une évacuation préventive.
Richard Cohen écrit :
« Avant de s’emparer de la Maison d’Enfants à la Rose, la Gestapo avait fait une descente au Siège Social de l’UGIF à Marseille et présenté un ultimatum à Gaston Kahn : notifier à la Maison d’Enfants l’imminente décision allemande ou affronter une action majeure contre la communauté juive de Marseille. Il semble que M. Brener ait été présent et qu’il ait exigé la dispersion immédiate des enfants, mais G. Kahn en décida autrement et les enfants furent déportés. (Jules Jefroykin et M. Brener fournissent en 1977 une information identique à ce sujet) »5
Aussi, quelle ne fut pas la surprise de Raymond-Raoul Lambert, interné à Drancy avec sa femme et ses quatre enfants depuis août 1943, lorsqu’il vit arriver les pensionnaires de la Verdière le 22 octobre. Dans une lettre codée qu’il adressa à Maurice Brener, le mardi 26 octobre, il écrivit :
« Mon cher Mena, nous avons été heureux de recevoir la visite d’Alice, de Claude et de tous les enfants. Mais nous ne comprenons pas qu’on les ait poussé à faire ce voyage fatigant. Il est stupide de les avoir poussés à venir, puisqu’ils pouvaient continuer leur tournée vers la Lorraine6. Alice nous a raconté la consultation qui a précédé le voyage. Si ce qu’elle m’a dit est vrai, je suis de ton avis et j’espère que si une telle crise se déclare à nouveau, on agira plus crânement et qu’on se conformera aux ordonnances du docteur Sabord7. Les concessions à la maladie ne retarderont pas l’entrée en clinique des peureux, des plus peureux… Je sais maintenant ce qu’Alice a fait pour nous et je me demande à quoi ont pensé les autres que toi… J’écris au magasin Sylvabelle8 pour la chose très importante qu’on a laissé tomber… Par cette négligence, des centaines de malades mourront de froid cet hiver, qu’on se le dise ».
Le 20 octobre 1943, 44 personnes furent arrêtées. Parmi elles, 30 enfants et 9 mères. Le centre au complet fut déporté à Drancy. Afin d’empêcher toute possibilité de protestations ou de fuites, les Allemands prirent 60 otages. Alice Salomon se joignit volontairement au convoi des enfants déportés. De Drancy, ils furent ensuite conduits au camp d’extermination d’Auschwitz. Presque tous furent déportés par le convoi n° 61 du 28 octobre 1943 sauf la famille Aboudy (convoi n° 68) et Alice Salomon, Serge De Minden et Claude Lehmann (convoi n° 62 du 20 novembre 1943). Aucun ne revint à la fin de la guerre, excepté Claude Lehmann. Mères et enfants furent tous gazés.
Les sœurs Chicheportiche racontent :
« Dans le tram qui nous menait à la Rose avec notre valise de vêtements d’hiver que nous apportions à notre mère, nous avons appris qu’il s’était passé quelque chose au “Château”. Nous avons rencontré une amie de Saint-Martin-Vésubie et sa mère qui revenaient de voir maman. Elle nous demanda de ne pas y aller car on venait d’emmener tout le monde. Nous ne l’avons pas écoutée. Nous sommes montées dans la chambre, avons fouillé dans l’armoire pour voir s’il n’y avait pas de message. Il fallait nous presser car un personnel du “Château” nous criait que les Allemands pouvaient revenir. La chambre était comme d’habitude, il y avait tout, notre mère n’avait rien emporté semblait-il. Il y avait les habits, de la nourriture... C’était pareil dans les autres chambres. Nous avons posé les affaires d’hiver et repris quelques effets. Mais tout cela dans la hâte et la peur ».
Malgré les multiples interventions auprès de l’UGIF ou de la Croix-Rouge, les efforts des familles pour les retrouver et prendre des nouvelles sont inutiles et les réponses toujours les mêmes, négatives. Gaston Kahn remplaça Raymond-Raoul Lambert jusqu’au 6 décembre 1943, date à laquelle la Gestapo pénétra dans un bureau de l’UGIF, arrêta deux agents du réseau clandestin et intercepta un abondant matériel de faux papiers. Le 15 décembre 1943, le siège central de l’UGIF – qui fonctionna jusqu’à la Libération – fut transféré Lyon.
Source : HAZZAN, Suzette. La maison de la Verdière à La Rose : d’une halte précaire à la déportation des enfants et des mères In : Provence-Auschwitz : De l'internement des étrangers à la déportation des juifs 1939-1944 [en ligne]. Aix-en-Provence : Presses universitaires de Provence, 2007 (généré le 26 septembre 2018). Disponible sur Internet :
27/09/2018
Auteur : Robert Mencherini
Lien : Provence-Auschwitz
La fin de l’année 1943
La Verdière continua à recevoir des pensionnaires après la rafle du 20 octobre. Des témoignages le confirment jusqu’en décembre 1943.
Estelle Attas, veuve Decalo, marseillaise depuis 1923, qui habitait 27, rue Thiers témoigne :
« Je ne sais pas grand-chose sur la Verdière. Mais mon petit-neveu Jacques Attas âgé de 2 ans était là avec sa tante Coronel et son bébé, Albert âgé de quelques mois. Mon neveu se trouvait là car ma belle-sœur, la mère de Jacques était à la prison Saint-Pierre. Je suis allée le voir un jour car je voulais l’enlever de là. Je suis rentrée par la petite porte et je me suis trouvée dans un grand parc, il n’y avait pas de gardes, pas d’Allemands... Je suis montée au 1er étage. Je suis rentrée au hasard dans une chambre où il y avait trois ou quatre lits et mon petit-neveu était là et dormait. Je l’ai pris dans mes bras pour m’enfuir avec lui. (Au même moment, sa tante et d’autres mères se sont mises à crier que si je prenais mon neveu, elles seraient toutes déportées, car, à la Verdière il n’y avait que des mères avec leurs bébés et des enfants en bas âge). Je pris peur. Je ne voulais pas que toutes ces femmes soient déportées ou fouillées par ma faute. Cela se passait fin novembre ou début décembre 1943. Hélas ! Elles furent toutes déportées et aucune ne revint de cet enfer ».
Jacques Attas, Albert Coronel et sa mère Rosalie furent déportés à Auschwitz par le convoi n° 63 du 17 décembre 1943 après être arrivés à Drancy le 15 décembre 1943.
Ils ne furent pas les seuls à être déportés de la Verdière en décembre 1943 par la Gestapo. 35 vieillards juifs du centre de La Clue aux Camoins furent conduits à la Verdière en décembre et déportés aussi.
Suzanne Vigderhaus, réfugiée de Paris à Nîmes fut arrêtée avec toute sa famille en 1943 et envoyée à la prison Saint-Pierre. Mais, peu avant, victime d’un grave accident, elle fut conduite à l’hôpital de la Conception sous le contrôle de l’UGIF qui lui recommanda de ne pas s’évader sinon « on » prendrait vingt personnes âgées. Elle fut transférée au centre des Camoins à La Clue où se trouvaient déjà beaucoup de personnes âgées.
« On pouvait se déplacer et pour se rendre en ville, on passait devant la Verdière. On savait qu’il y avait là des femmes et des enfants. Je m’y suis rendue car il y avait une dame de Nîmes et ses trois enfants (Mme Blumenfeld). Puis ce fut mon tour d’y aller en décembre 1943. Nous y vivions en collectivité. Nous descendions de temps en temps à Marseille. Tous les jours des cars arrivaient et nous étions de plus en plus nombreux au fur et à mesure que l’heure de notre déportation approchait. Nous étions plusieurs dans les chambres et même dans les salles en bas. Un matin, au moment du petit-déjeuner, vers la mi-décembre, la Gestapo est venue remplir un car, trop petit d’ailleurs pour le grand nombre de déportés que nous étions. Il n’y avait pas d’enfants dans notre convoi. Personne ne devait rester paraît-il. Nous avons été conduits aux Baumettes où nous sommes restés peu de temps. J’ai été déportée à Auschwitz Birkenau (matricule n° 72462) puis évacuée à Ravensbrück et de camps en camps... »
Madame Osiel âgée de 67 ans a dû subir le même sort. Après avoir été « libérée » avec Fortunée Tordjman de la déportation immédiate en mai 1943 par l’action de Raymond-Raoul Lambert, les autorités allemandes gérèrent de la même façon son placement dans la Maison de la Clue, puis à la Verdière d’où elle fut déportée comme en témoigne la lettre que sa fille adressa à l’UGIF, le 14 décembre 1943.
Source : HAZZAN, Suzette. La maison de la Verdière à La Rose : d’une halte précaire à la déportation des enfants et des mères In : Provence-Auschwitz : De l'internement des étrangers à la déportation des juifs 1939-1944 [en ligne]. Aix-en-Provence : Presses universitaires de Provence, 2007 (généré le 26 septembre 2018). Disponible sur Internet : <http://books.openedition.org/pup/6872>. ISBN : 9782821885578. DOI : 10.4000/books.pup.6872.
27/09/2018
Auteur : Robert Mencherini
Lien : Provence-Auschwitz
Conclusion
11,5 % des enfants juifs de 15 ans et au-dessous furent déportés en France. Grâce aux efforts clandestins des organisations juives et des protecteurs non juifs très nombreux, le taux d’enfants parmi les déportés fut moins élevé en France qu’en Belgique (20 %). À la Verdière, comme ailleurs, ce sont des enfants des familles démunies qui en constituèrent la forte majorité par suite.
« des déportations à partir de résidences forcées, des brigades de travail et des camps, des arrestations dans les refuges de l’UGIF et dans ses bureaux mêmes, où les gens venaient encaisser des allocations de secours. Tout indique un processus de sélection qui commençait invariablement et finissait souvent avec l’arrestation des éléments les plus défavorisés de la communauté ».
Les enfants ont bénéficié d’un semblant de vie familiale pendant quelques mois supplémentaires à la Verdière, entourés d’hommes et de femmes dévoués, à l’exemple d’Alice Salomon. Ils n’en étaient pas moins les otages fragiles des nazis. Le terrible événement s’inscrivit dans une période où ceux-ci, rencontrant de plus en plus d’obstacles, « la police allemande organisait des expéditions contre des cibles arbitraires sans trop se soucier de la nature des victimes ». Les enfants de la Maison d’Izieu, déportés le 6 avril 1944, furent aussi les victimes de cette traque systématique qui s’accentuait au fur et à mesure que la situation militaire allemande faiblissait.
« Face à un ennemi totalitaire, suffisamment puissant pour l’emporter temporairement sur les armées européennes bien équipées, et entièrement dévoué à la réalisation d’un objectif hautement prioritaire, obéissant à des principes idéologiques, l’extermination d’un peuple entier, les activités des conseils et même leur collaboration inconsciente et involontaire avec les nazis démontre avant tout à quel point le peuple juif était démuni et sans défense ».
En 1944, le Château de la Verdière a servi de lieu de résidence à des soldats allemands puis français. En 1945, ce sont des prisonniers allemands qui y résidèrent, puis, en 1947, des juifs en instance de départ pour la Palestine. La Verdière devint une clinique en 1956.
Pendant longtemps, l’emplacement exact du « château de la Rose » est demeuré mystérieux. Il n’a pas été facile de le localiser parce que le drame de la Verdière n’était pas connu et les habitants du quartier ignoraient tout. Depuis ces événements, les maisons voisines ont changé plusieurs fois de propriétaires. L’adresse exacte a été retrouvée en 1993, lorsque des familles de déportés de la Verdière ont commencé à se manifester.
Les membres de l’Amicale des déportés d’Auschwitz, les étudiants de l’UEJF (Union des étudiants juifs de France) et beaucoup d’autres personnes du quartier ont agi pour que cette maison soit maintenue pour la mémoire collective et restaurée et classée pour devenir une crèche ou un centre pour enfants afin que les rires et les jeux y retrouvent leur place.
En juin 1994, elle a été détruite pour faire place à un centre commercial et à une pharmacie. En 1996, les étudiants de l’UEJF ont apposé une plaque sauvage à l’emplacement de la maison et le 29 janvier 1998 une stèle a été officiellement élevée par le sénateur-maire, Monsieur Gaudin.
Source : HAZZAN, Suzette. La maison de la Verdière à La Rose : d’une halte précaire à la déportation des enfants et des mères In : Provence-Auschwitz : De l'internement des étrangers à la déportation des juifs 1939-1944 [en ligne]. Aix-en-Provence : Presses universitaires de Provence, 2007 (généré le 26 septembre 2018). Disponible sur Internet :
27/09/2018
Auteur : Robert Mencherini
Lien : Provence-Auschwitz
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- 1 - CDJC MF 63 Folder 92.103, p. 652.
- 2 - CDJC MF 74 Folder 98-12.
- 3 - CDJC MF 74 Folder 98.12 p. 678, lettre d’Alice Salomon transmise à Raymond-Raoul Lambert, 30 mai 1943.
- 4 - CDJC MF74 p. 679-680, rapport du docteur Lévy au directeur général de l’UGIF, 13 juillet 1943.
- 5 - Journal Raymond-Raoul Lambert (directeur de l'UGIF, note de Richard Cohen, n° 3, p. 292. Maurice Brener, cousin de Raymond-Raoul Lambert, membre de l’UGIF, son secrétaire personnel et son confident. Jules Jefroykin était aussi membre de l’UGIF et occupait d’importantes fonctions dans les mouvements de résistance juive en zone sud.
- 6 - Dans ses notes, Richard Cohen déclare que Raymond-Raoul Lambert pensait que « la déportation aurait pu être évitée si les enfants avaient été envoyés en Lorraine, puis en Suisse ».
- 7 - Sabord : désobéir, se saborder – disperser les enfants.
- 8 - Le siège social de l’UGIF se trouvait rue Sylvabelle à Marseille.
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