Norbert Herz

Norbert Herz est né à Berlin.

Il se souvient d’avoir quitté sa ville natale au lendemain de la Nuit de Cristal en taxi vers la frontière Belge, pour rejoindre la famille maternelle. Puis la France en train pour atteindre Boulogne-sur-Gesse  enfin le camp de Brens et Rivesaltes : le froid, le vent, la faim, une petite fête de noël dans une baraque de la Croix-rouge : un peu de chaleur et de joie dans cette vie triste, enfin Palavas les Flots et Brout-Vernet. « Nous couchions à cinq dans une chambre. J’ai le souvenir du froid et de la neige l’hiver dans l’Allier. A cette époque, nos moniteurs étaient convaincus qu’il était très sain de dormir les fenêtres grandes ouvertes. Le résultat était que beaucoup d’enfants mouillaient leurs lits. Autre chose très en vogue était la douche matinale. Myriam, notre monitrice avait la charge de forcer les gosses récalcitrants sous les douches. L’hiver, n’ayant pas de chaussures adéquates, je portais des bottes de dames avec talons que ma tante m’avait envoyées de Gaillac. J’ai connu la première directrice Melle Bass, une vieille dame dépassée par les évènements. Puis M Zélikowski a régné en maître dans la maison. Il battait les enfants et nous avions très peur de lui. Chaque matin, nous marchions en rang jusqu’à l’école communale de Broût- Vernet. Personnellement, je veillais toujours à bien me comporter, car j’avais très peur d’être envoyé chez le directeur. Les après-midi étaient vouées à l’instruction religieuse : nous apprenions à lire l’hébreu et à comprendre la Torah. De l’école, je garde un bon souvenir. J’aimais les cours surtout la géographie. Les instituteurs nous appréciaient beaucoup parce que nous avions un niveau plus élevé que les autres écoliers. Ils venaient souvent au château. Nous, les enfants allions souvent chez les paysans du village. Je me souviens en particulier de la fermière Colette chez qui on allait chercher le lait et qui nous donnait des biscuits à vaches. On se disputait pour y aller, car nous avions faim au château. »

L’itinéraire de Norbert ne s’arrête pas là. L’été 1942, il obtient la permission de passer quelques temps chez son oncle et sa tante qui résidaient à Gaillac, libérés de Rivesaltes pour mauvaise santé : un temps heureux, en famille, à la découverte de la vie paysanne. Malheureusement, tout le monde est arrêté lors de la rafle du 26 août et dirigé vers le camp d’Albi. « Je n’oublierais jamais les pleurs et les supplications de mon oncle et de ma tante. Arrivés au camp d’Albi dans la nuit, jai demandé à rejoindre ma mère à Rivesaltes. La même nuit, accompagné d’un gendarme j’ai voyagé en train. Nous sommes arrivés le lendemain matin. A l’ilot K, j’ai retrouvé ma mère qui me croyait en sécurité à Broût-Vernet. Rivesaltes avait encore changé en pire. Des gens mourraient de faim et de maladie. Ma mère gardait les malades et les mourants la nuit. En se rendant utile, elle pensait sauver sa vie. Elle avait vu juste. Un matin, les déportations ont commencé. Les enfants furent enfermés dans une baraque. Nous avons attendu toute une journée. Puis dans l’après-midi, les parents qui n’avaient pas été déportés sont venus récupérés leurs enfants. J’entends encore les pleurs et les cris. Ma mère était parmi eux. Elle m’a raconté qu’elle était déjà dans le camion lorsque le médecin du camp la fait redescendre argumentant qu’il avait besoin d’elle. De Rivesaltes ma mère a été transférée à Gurs où elle est restée jusqu’à la Libération. »

L’OSE arrive à faire ressortir Norbert qui retourne à Broût-Vernet. Il y reste jusqu’en mai 1943, date à laquelle il part en Suisse avec un convoi d’enfants puis en Palestine avec l’Alyah des jeunes. Il y reste plusieurs années et vit maintenant à Londres.