Jean* et Andrée Orgeval* sont propriétaires de la Brasserie paloise, modeste établissement à Pau.
Mania Goldberger est couturière et Martin, bûcheron. Ils avaient fuit l'Allemagne huit jours avant la nuit de Cristal pour rejoindre la Belgique, puis la France lors de l'annexion du royaume belge.
Ils trouvent refuge à Pau, où ils habitent, avec leur petite fille Suzy, encore bébé, une mansarde en face de l'établissement des Orgeval. Chaque soir, sa journée de travail terminée, Martin Goldberger rejoint par Charles, oncle de Mania, s’assied au café devant un verre de schnaps en compagnie d’un employé de mairie originaire d'Alsace, germanophone comme eux.

En août 1942, la police française procède à des arrestations massives de Juifs étrangers pour les déporter vers le camp de Gurs.
Un matin, l’employé de mairie vient au domicile des Goldberger les informer qu’ils figurent sur la liste des Juifs à arrêter et qu'ils doivent fuir sans délai. Mania ne sait comment joindre son époux déjà parti travailler dans la forêt.
En attendant, elle demande au compagnon de schnaps d'aller voir si les Orgeval* acceptent de la cacher. Jean Orgeval* donne son accord, se déclarant prêt à donner asile à la jeune femme et à la petite Suzy dans le grenier du café et à assurer leur nourriture, à condition qu'elles n'en descendent à aucun prix et ne fassent aucun bruit.
Mania Goldberger prend en hâte quelques objets de première nécessité et court se réfugier en face. Prévenu, son mari la rejoint un peu plus tard. Ils y resteront deux mois.

Ne trouvant pas les Goldberger à leur domicile, la police se présente au café. Les Orgeval affirment qu'ils n'ont pas vu les fugitifs et qu'ils ignorent où ils peuvent être, ce qui n'empêche pas les policiers de revenir plusieurs jours de suite.
Andrée Orgeval va, à Limoges, informer l'oncle de Mania Goldberger des événements survenus et lui dévoile que ses neveux se trouvent chez elle.
L'oncle Charles, un ancien combattant, se rend à la préfecture de police de Pau et s'indigne de ce que sa nièce et son mari soient inclus à la liste des Juifs à arrêter. Il réussit à faire retirer leurs noms de la liste.

Les Goldberger peuvent alors rentrer chez eux.
Cependant, en novembre 1942, inquiet pour leur sort, Jean Orgeval* prend ses dispositions pour les faire passer clandestinement à Annemasse avec une autre famille juive, cachés dans une camionnette de la compagnie d’électricité. Arrivés à Annemasse, les fugitifs réussissent à franchir la frontière et trouvent asile en Suisse.

Jean Orgeval* a sauvé de nombreuses familles juives et aidé des soldats anglais et américains à passer en Espagne.

C'est Suzy Sprecher, née Goldberger, qui vécu en Belgique avant de partir vivre en Israël, qui eut envie de savoir qui les avait sauvés et après quatorze années de recherche elle retrouva la trace des Orgeval. C'est à Bordeaux que les sauveteurs et la sauvée firent connaissance, tant d'années plus tard.
Jean Orgeval*, résistant, ne parla jamais de ses actions. Ses filles, Monique et Jacqueline, ignoraient que leur père avait abrité et sauvé des vies dans la maison qu'elles habitaient.
Il raconta à Suzy lors des retrouvailles : "Je n'ai fait que mon devoir sinon les Boches te fusillaient toi et tes parents".

Jean* et Andrée Orgeval* ont reçu le titre de Juste parmi les Nations à titre posthume, en 1998. Leurs deux filles Monique (la grand-mère de Jessica) et Jacqueline et Philippe Orgeval, le fils du second mariage de Jean Orgeval* se sont rendus en Israël pour recevoir ce titre.

Lien vers le Comité français pour Yad Vashem

Témoignage de Jessica Bories

20/04/2010
Lien : Fondation France-Israël