Gilbert Blum

La famille Nègre exploitait une petite ferme isolée de montagne aux lieux dits Les Grangers et Pont Perdu sur la commune de Saint-Martin l'Inférieur (aujourd'hui Saint-Martin-sur-Lavezon) au pied du Coiron en Ardèche. 
Vital et Zoé Nègre* avaient six filles : Marthe, l'aînée et Emma sa soeur qui travaillaient à Montélimar et les plus jeunes, Hélène, Rose, Marie et Berthe Nègre*, née en 1918. 

Lorsque la guerre éclata, Berthe Nègre* vivait encore chez ses parents et faisait des ménages pour gagner sa vie. Ses trois soeurs aînées habitaient à Montélimar (Drôme). 

Le 6 juin 1942, Marthe et Emma accueillent en gare de Montélimar une dame Petit, une Parisienne à l'accent pointu et à. l'allure sérieuse et un peu distante des gens de la ville, accompagnée de ses quatre enfants.
La famille Petit fut reçut à bras ouverts par Vital et Zoé Nègre*. Ils repartent à la fin de l'année 1942.

Yvonne Blum et ses deux enfants, Gilbert, né en 1934, et Nicole, née en 1936, avaient quitté Saint-Louis en Alsace en septembre 1939 et étaient parti se réfugier à Maîche dans le Doubs.
Son mari, Paul Blum, né en 1906, mobilisé à Melun a été fait prisonnier pas les Allemands au Camp de Pithiviers. 
En 1942, lorsque Maîche est occupé par les Allemands, Yvonne Blum part avec ses enfants pour Montélimar (Drôme) afin de rejoindre ses parents Eugénie et Marcus Brunschwig.  
Rose et Marie Nègre sympathisèrent avec Yvonne Blum et elles devinrent grandes amies. 

En février 1944, Hélène Nègre qui travaillait à Valence apprend que la Gestapo s'apprêtait à arrêter des Juifs dans la ville. Elle avertit Rose qui invite Yvonne Blum et ses enfants à se réfugier dans la ferme de ses parents à Saint-Martin l'Inférieur. 
Les Nègre accueillirent les trois fugitifs avec chaleur. Berthe Nègre* et sa mère Zoé Nègre n'avaient pas révélé à Vital Nègre âgé de 74 ans qu'il s'agissait de Juifs. Non qu'il s'y serait opposé, bien au contraire : dreyfusard convaincu, il portait le même chapeau que Léon Blum et n'aurait pas manqué de se vanter dans tout le village sans comprendre qu'il mettait ses hôtes en danger. 
Yvonne Blum et ses enfants aidaient à la ferme, ne rechignant pas à la tâche. La mère travaillait aux champs tandis que les enfants gardaient les chèvres et les moutons ou aidaient à mener les boeufs.

Yvonne Blum continua à se rendre régulièrement à Montélimar pour faire ses courses jusqu'en juillet 1944, lorsque Rose lui envoya un télégramme codé "Tante Julie très malade que Madame Yvonne ne descende pas." pour la prévenir de ne plus venir, car des agents de la Gestapo s'étaient présentés à son domicile Grand'rue pour l'arrêter, elle et ses enfants. Les Nègre n'acceptèrent aucun loyer de Yvonne Blum pour son séjour à la ferme. 

Avant de repartir en août 1944, Yvonne Blum avoua à Vital Nègre qu'elle était juive. "Je vous aime encore davantage" répondit-il...

Les relations chaleureuses établies entre les deux familles se poursuivirent pendant de nombreuses années après la guerre et se sont transmises à la seconde génération.

Le 15 juillet 1998, Yad Vashem a décerné à Berthe Nègre Lantheaume* et à sa mère Zoé Nègre*, le titre de Juste parmi les Nations.