Charles Westphal

	Pasteur Charles Westphal source photo : Fédération Protestante de France crédit photo : D.R.

Charles Westphal* est né à Montpellier en 1896.
Après des études classiques à Paris, il s'engage comme volontaire, dès les premiers mois de 1914. Il sera grièvement blessé et décoré de la croix de guerre.
A la fin des hostilités, il commence des études de théologie à la faculté de théologie protestante de Paris, puis à l'Union théological seminary de New York, puis à Edimbourg.

Après un premier poste pastoral à Châtillon-en-Diois dans la Drôme, Charles Westphal* devient en 1929 Secrétaire Général de la Fédération Française des étudiants Chrétiens, la Fédé, succédant au pasteur Pierre Maury, qu'il marque de son ouverture vers l'œcuménisme et de sa grande culture littéraire. Il était un lecteur assidu de Kierkegaard et un grand admirateur de Claudel.
Après un intérim à l'Église réformée de Pentemont (Paris) il est nommé à Grenoble où il a la charge d'un ministère d'enseignement et de formation théologique des laïcs de 1939 à 1945.
Passionné des relations judéo-chrétiennes, Barthien - c'est par son intermédiaire que Karl Barth adresse sa première lettre de décembre 1939 aux protestants français.

Le dimanche 14 juillet 1940, le Pasteur Charles Westphal* condamne en chaire le régime nazi. Bien que dénoncé, il ne sera pas arrêté.
De septembre 1941 à 1942, en pleine occupation, sont rédigées sous sa direction des thèses prônant la tolérance et rejetant le racisme et les persécutions religieuses.

Il aide des étudiants choisissant le maquis et la résistance et de nombreux juifs désirant passer en Suisse, et crée les Cahiers d'Études Juives.
Directeur de la revue protestante Foi et Vie, avant la guerre, il avait préconisé une série de Cahiers spéciaux d'études juives qui fut à l'origine d'une véritable révolution de la mentalité protestante dans ses rapports entre Chrétiens et Juifs.

Il ne tarda pas à dire son opposition à la politique antisémite et à demander à ses paroissiens de "résister avec une foi ferme", dans la ligne des thèses de Pomeyrol¹, auxquelles il apporta sa contribution.

Charles Westphal* se mit au service des juifs persécutés, n'hésitant pas à prendre de grands risques personnels, dont il ne parla jamais. Il participa ainsi au passage en Suisse de nombreux juifs. Partageant son engagement, Denise*, son épouse fit des miracles pour nourrir tous ces clandestins, en plus de ses six enfants, avec les tickets de rationnement.
Président de la Fédé, associations d'étudiants chrétiens, pour la zone Sud, il a aussi soutenu les étudiants ralliés aux maquis de la région et pris parti contre le STO.

En 1943, il héberge dans sa famille à Grenoble Simon Feigelson, un jeune juif de 18 ans qui, sous un faux nom put échapper au STO.
Denise* et Charles Westphal* ont six enfants. Bien qu’il soit difficile de nourrir tout ce monde, ils n'hésitent pas à accueillir Simon Feigelson, qui n'a plus de carte d'alimentation, et qui est, de plus, recherché par la police.
La Gestapo et la police française sévissent à Grenoble, mais malgré les risques de dénonciation, les Westphal* assurent la sécurité de Simon Feigelson, lui prodiguant gentillesse et sympathie pour adoucir ses malheurs.
Après 4 mois chez les Westphal*, Simon Feigelson se rend dans la Drôme, rejoint un camp de maquisards, et s'engage dans l'armée française à la libération.

Le Pasteur Charles Westphal* et son épouse ne se sont pas contentés de sauver Simon Feigelson. Leurs actions héroïques durant cette sombre période se doivent d'être évoquées car la famille Westphal*, malgré la peur et le danger, se montra intrépide en toutes circonstances.
Il faut mentionner le ménage juif caché dans la chambre du dernier étage, à qui l'ont portait en cachette ses repas, le peintre hongrois Imre Gomery, que le Pasteur Charles Westphal* réussit à faire libérer du camp de Rivesaltes, ses visites au siège de la Gestapo pour essayer et réussir d'en sortir quelques uns.

Après la guerre, il témoigna en faveur de l'un de ses paroissiens, Raoul Didkowski, protestant, qui resta préfet de l'Isère de 1940 à 1943. Il affirma que le préfet l'aida toujours par différentes démarches à cacher des étrangers ou des juifs, à libérer des détenus des camps d'internement, à aider les jeunes à échapper au STO.

Par la suite, il resta attentif à tous les symptômes de renaissance de l'antisémitisme. Il présidera le comité de la Fédération protestante de France "Église et Israël". Dans sa perspective le rapprochement avec l'ensemble de la Communauté juive ne pouvait exclure la sympathie pour l'État d'Israël.
Directeur de la Revue de Théologie protestante Foi et Vie, il est nommé vice-président de la Fédération Protestante en 1947 et en devient président en 1961 à la suite du pasteur Marc Boegner*, poste qu'il conserve jusqu'en 1970.

Pionnier du mouvement œcuménique, ses interventions aux assemblées du Conseil œcuménique des Églises, ont été très remarquées. C'est ainsi qu'en 1961 à l'Assemblée du COE à New Delhi, il réussit à faire voter une déclaration déposée in extremis.²

L'Assemblée rappelait un premier texte voté lors de sa fondation à Amsterdam en 1948 : "Nous appelons toutes les Églises que nous représentons à dénoncer l'antisémitisme, quelle que soit son origine, comme étant absolument inconciliable avec la profession et la pratique de la foi chrétienne. L'antisémitisme est un péché contre Dieu et contre l'Homme. Ce n'est qu'en donnant à note prochain juif la preuve convaincante que nous réclamons pour lui les droits et les privilèges que Dieu veut pour ses enfants, que nous pouvons le rencontrer de telle sorte qu'il nous soit possible de partager avec lui les choses excellentes que Dieu nous a données en Christ."

Charles Westphal* succéda au pasteur Marc Boegner* à la présidence du conseil de la Fédération Protestante de France de 1961 à 1970, tout en continuant d'être pasteur de la paroisse réformée du Saint-Esprit, rue Roquépine à Paris. Décédé le 1er janvier 1972, les revues Tribune Juive et Informations Juives lui dédièrent un vibrant hommage.

Denise* et Charles Westphal* étant décédés, c'est leur fille Claude Richard-Molard, qui a reçu, en leur mémoire, la Médaille des Justes.

Lien vers le Comité français pour Yad Vashem