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Paris

Région :
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Département :
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(1934 - 1940) Achille Joseph Henri Villey-Desmeserets, Préfet de la Seine (1878-1953)
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René Bouffet
(19/08/1942 - 19/08/1944) Préfet de la Seine. Arrêté et révoqué par la Résistance le 19 août 1944 (1896-1945)
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(1944 - 1946) Préfet de la Seine (1892-1971)
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Texte pour ecartement lateral

Hélène Mordkovitch Viannay

Texte pour ecartement lateral

Paris 75000 Paris
Nom de naissance: Mordkovitch
Nom d'épouse: Viannay
Date de naissance: 12/07/1917 (Paris 14e)
Date de décès: 25/12/2006
Nationalité : Française
Profession: Journaliste
Qualité: Résistante, fondatrice du mouvement et du journal
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Helene-Mordkovitch-Viannay
Hélène Viannay en 2005
source photo : Arch. fam.
crédit photo : D.R.
Histoire

Interview d'Hélène Viannay

Hélène Viannay est une des fondatrices du journal Défense de la France. Françoise Thébaud et Dominique Veillon sont venues l'interroger sur son expérience de femme résistante.

Dominique VEILLON : Françoise Thébaud et moi, nous sommes venues vous poser quelques questions parce qu'encore une fois on a l'impression de savoir beaucoup de choses et, quand on veut décortiquer, on s'aperçoit qu'on ne sait pas grand-chose d'Hélène. Notamment sur ce qui vous a amenée à entrer en résistance, on aimerait un peu dépasser les généralités : est-ce que le fait d'être dans un milieu composé d'étrangers vous aurait davantage poussée que d'autres à entrer en résistance ? Est-ce que, pour vous, cela a été une motivation ou bien est-ce que vous avez d'autres explications ?

Hélène VIANNAY : C'est une très bonne question. Ma mère venait de Sibérie, venue en France en 1908 parce qu' elle avait été exilée par les Tsars ; ce n'était pas une Russe blanche, c'était une révolutionnaire qui avait fait de la prison en 1905 en Russie. Elle avait presque terminé ses études de médecine en Russie, à une époque où en France bien peu de femmes faisaient ce genre d'études. Elle est venue en France parce que c'était pour elle la terre de la liberté, la terre de la Révolution française, c'était très important, c'était tout un mythe. Et moi, j'ai été élevée dans ce mythe et j'ai toujours entendu chez moi les conversations suivantes : ma mère recevait des Russes, qui étaient des Russes blancs, elle était une révolutionnaire, c'était donc des milieux différents, elle laissait toujours les gens s'exprimer, ils étaient très nostalgiques de leur ancien pays et de leur ancienne vie. Elle laissait parler les gens et elle finissait toujours la conversation en disant : " vous dites toujours chez nous, en Russie, mais la terre de la liberté c'est ici, en France". J'ai donc été élevée dans cette idée là. Je voulais aussi être française, le français est ma langue maternelle, ma mère ne m'a enseigné le russe qu'après, car elle savait déjà que je resterais toujours en France.

A l'école communale j'étais relativement bonne élève. Je suis rentrée tard et je voulais rattraper les autres. Un jour, l'institutrice a dit : "vous n'avez pas honte que ce soit une petite Russe qui soit première en français ?". Je me suis levée comme un seul homme et j'ai dit : "je ne suis pas russe, je suis française !". Je m'appelais Mordkovitch, c'était un peu difficile pour moi de comprendre que ce n'était pas un nom français. Le fait est que je n'étais pas française, contrairement à ce que je croyais. Je ne le suis devenue qu'à quinze ans en optant pour la nationalité française, c'était donc un acte réfléchi. […]

Ma mère est morte en 1937 alors que j'avais 20 ans et, avant de mourir, elle m'a dit : "je suis désolée de te laisser, il va y avoir la guerre et la France va la perdre, parce que les Français ne veulent pas se battre ; l'Allemagne veut conquérir l'Europe ; quand l'Allemagne aura vaincu la France, elle se retournera contre l'Union Soviétique". C'était en 1937. Moi, j'ai écouté en me disant : "c'est pourtant vrai" ; et j'étais sûre que c'était vrai parce que j'étais antimilitariste comme mes camarades de lycée ; nous ne voulions pas la guerre, même si à côté de nous il y avait un puissant nazi qui était dangereux et voulait conquérir l'Europe. Donc je savais ça, et je n'ai jamais compris pourquoi nos dirigeants ne l'avaient pas compris aussi clairement que ma mère. En 1940, quand la défaite est arrivée, je savais qu'elle devait arriver, ce n'était pas une révélation pour moi, donc cela n'a pas été le choc que ça a été pour la plupart des Français [...]. C'est malgré tout très dur à vivre mais ce n'est pas la même chose que pour des gens qui n' y étaient pas préparés. Cela dit, n'étant pas militariste et même antimilitariste - comme on peut l'être quand on est jeune -, je n'avais aucune confiance en Pétain. Pourquoi aurais-je eu confiance en ce vieux général qui avait conduit la France à la défaite ? Ce qui fait que je n'ai jamais été tentée d'être pétainiste, ça ne m'a jamais effleurée, alors que tant autour de moi croyaient que c'était un moindre mal, qu'il fallait arrêter les combats, qu'il allait défendre la France contre les malheurs qui l'attendaient . C'était plein d'illusions !

J'étais étudiante à la Sorbonne et en 1940, j'étais quand même partie dans le midi pour des raisons diverses et j'ai reçu une lettre de mon patron de la Sorbonne, Monsieur Lutaud, me disant : "mon enfant revenez au laboratoire, j'y suis tout seul, le garçon de bureau est prisonnier, l'assistant du laboratoire est prisonnier, les chercheurs sont partis, donc j'ai besoin de vous". Me voilà nommée assistante par intérim au laboratoire de géographie physique et géologie dynamique. Le patron était un homme de gauche, tout à fait anti pétainiste et qui avait une quantité de renseignements sur le séjour de Pétain en Espagne. Il avait des parents dans la diplomatie qui savaient comment Pétain avait préparé son accession au pouvoir […] C'est certain, j'étais dans un milieu très patriote dans le sens de la révolte contre Pétain. J'ai trouvé un climat favorable à ce que je pensais déjà et cela n'a fait que me donner des arguments et me conforter.

Françoise THÉBAUD. : Et l'entourage, les contacts que vous avez pu avoir avec d'autres jeunes vous ont-ils poussée aussi ? Est-ce que vous avez fait partie d'un mouvement de jeunesse par exemple ?

H. V. : J'avais été éclaireuse laïque, c'était sympathique mais dans l'immédiat ça ne m'a servi à rien parce j'avais quitté ce mouvement à 15 ans, c'était trop loin. Il se trouve que la première personne que j'ai recrutée après, quand j'ai commencé à faire de la résistance, c'était une de mes anciennes éclaireuses.

D. V. : Ça c'est intéressant, il y a des liens qui se sont créés ?

H. V. : Oui, mais c'est parce que nous avions fait ensemble, après le scoutisme, une randonnée en bicyclette le long des châteaux de la Loire, au début de 1939.

D. V. : Donc vous n'aviez pas laissé tomber, ce n'était plus le mouvement des éclaireuses mais des liens étaient tissés.

H. V. : Oui, quelques liens... En fait je ne sais pas ce que sont devenues les autres. Voilà... Moi, ce que j'ai fait en arrivant à Paris... Le premier choc ç'a été... J'étais peut-être attentiste pendant les mois de juin, juillet et août. Voyez, je ne savais pas du tout quoi faire, j'étais perdue dans ce Rodez (où j'étais réfugiée). J'ai essayé de travailler, de faire des choses, mais on se méfiait des femmes, des étrangères. J'avais toujours mon nom Mordkovitch, ce n'était pas facile.

F. T. : Quand vous dites : "on se méfiait des femmes", qu'est ce que vous entendez par là ?

H. V. : Et bien par exemple, je suis allée dans des fermes. J'avais travaillé dans des fermes en été plusieurs fois et je me suis dit : "les hommes sont prisonniers, on a besoin d'aide". Je suis allée dans plusieurs fermes proposer d'aider les gens à la moisson, aux foins, à des choses comme cela et on n'a jamais voulu de moi. Remarquez, c'était un pays un peu arriéré, les environs de Rodez, ce n'était pas très à la page.

F. T. : Vous êtes rentrée à Paris quel mois ?

H. V. : C'étaient les premiers jours de septembre et le retour a été plein d'enseignements. On s'inscrivait dans des trains de réfugiés, on était 40 par wagon avec de la paille par terre mais ça allait très bien. On s'inscrivait gratuitement, on avait droit à un ticket ; c'est la seule fois de toute la guerre où j'ai fait la queue parce que là je voulais rentrer. Mon patron m'appelait, il avait besoin de moi. En plus Paris, c'était ma ville… Tous les gens avec qui j'avais noué des relations sur place m'avaient confié des lettres parce que déjà le courrier ne passait plus ; j'ai acheté des journaux, j'ai mis tout ça dans un sac à dos ; j'avais une bicyclette, j'ai mis la bicyclette au bagage et on attendait le départ. Un homme se lève et dit : "je suis chargé d'être votre chef de wagon". Il s'est présenté : "je suis professeur de mathématique au lycée Carnot, je suis ici avec ma femme et mon enfant et je vais vous donner les consignes pour le passage ; nous allons passer la ligne de démarcation et ce passage est interdit aux juifs". Vous auriez entendu ça ! C'était extraordinaire : jusque là le wagon bruissait et tout d'un coup, un silence de mort, jamais on n'avait entendu ce mot "juif" prononcé, jamais ! Et pour tous les gens qui étaient là, c'était un choc ! Ensuite : "vous ne devez transporter ni lettres, ni journaux parce qu'à la ligne de démarcation nous serons fouillés...". Et puis le voyage a été reporté au lendemain. Alors on m'a redonné encore des lettres et des journaux. J'avais réfléchi et je me suis dit : "j'enlève toutes mes affaires personnelles et je ne mets que les lettres et les journaux dans le sac, je me débrouille pour arriver en avance et je le cache". Je l'ai caché sous la paille et je m'en suis désintéressée.

On est parti et je n'étais pas tellement tranquille. Je m'étais dit : "avec mon nom est-ce qu'on ne va pas m'interroger plus ?". Il faisait très beau et très chaud. À côté de moi, sur les marches du train, il y avait une jeune fille de quinze ans, une petite blonde aux yeux bleus qui me dit, juste avant la ligne de démarcation : "Mademoiselle, vous êtes sympathique, j'emporte avec moi des lettres et des journaux, je suis ici avec ma grand-mère ; si jamais j'étais arrêtée, voici l'adresse de mes parents". Je lui ai répondu : "donnant-donnant, si moi aussi je suis arrêtée, voici l'adresse de mon patron", puisque je n'avais plus de famille. Juste avant d'arriver en gare de Vierzon, les gens se sont pris de frénésie, de panique et se sont mis à déchirer, déchirer, déchirer des lettres et des journaux et à les jeter par les portières. Nous voilà dans la gare. En entrant, un drapeau croix gammée depuis le haut du toit jusqu'au sol, alors nous entrons en Allemagne, ce n'est plus la France, il n'y a aucun doute. La tension montait. Devant nous, deux soldats allemands font les cent pas. À un moment donné, j'ai compris ce qu'ils disaient, moi qui ne sais pas l'allemand. Ils nous regardent et disent : "Deutsche Mädchen" ou quelque chose comme cela ; nous ressemblons à deux jeunes filles allemandes, blondes aux yeux bleus. L'un des soldats s'approche de nous pour caresser la joue de la jeune fille, visiblement pour caresser la joue de la jeune fille ; elle se jette en arrière et bien moi je le gifle, ... à toute volée! Je n'avais jamais donné de gifles de ma vie, je n'en ai jamais donné depuis mais j'y suis allée de bon cœur et l'Allemand est resté comme ça... On a entendu un sifflet et le train est parti : pas de fouille, rien, aucune conséquence. J'ai pleuré à chaudes larmes, la petite jeune fille a pleuré à chaudes larmes, on s'est embrassé et j'ai dit : "bon, bien, maintenant je sais où je suis, pas possible, je ne peux pas supporter, je ne les supporte pas, qu'ils s'en aillent !". Vous voyez, c'est comme ça qu'on devient résistant, ce n'était pas plus compliqué. J'ai récupéré mes journaux et j'ai vu Paris. En montant rue Soufflot avec mes bagages, je vois des gens faire la queue rue Saint-Jacques, où il y avait plein de petits magasins d'alimentation à l'époque, et des Allemands en train de les photographier. J'ai eu honte et je me suis dit : "jamais je ne ferai la queue" ; et j'ai fait la guerre sans la faire.

D. V. : C'est extraordinaire ! Vous avez été le contraire de tout le monde qui faisait la queue.

H. V. : Exactement. J'ai lu votre livre, mais je n'ai jamais fait la queue ; j'ai failli en mourir d'ailleurs, parce que je n'avais rien , j'étais étudiante, je devais avoir une livre de sucre et un demi litre d'huile comme réserve et puis c'est tout.

Arrivée chez moi, je vais voir le patron pour qu'il me donne du travail. Première tâche : inscrire les étudiants qui vont se présenter. On parle un peu des événements et puis voilà. Parmi les étudiants qui se présentent à ce petit certificat de licence géographie physique et géologie dynamique - c'était un tout petit laboratoire il y avait entre 20 et 40 étudiants selon les années - se trouve Philippe Viannay. J'interrogeais les étudiants puisque c'est moi qui les recevais. Donc j'interroge Philippe Viannay qui arrivait là très décontracté. Je lui demande ce qu'il a fait avant. Il me dit : "je suis étudiant en philosophie, je prépare l'agrégation de philosophie". Alors je lui demande : "que venez-vous faire chez nous ?" Il me répond : "nous avons besoin d'un certificat de sciences et comme celui là est le plus facile, c'est là que je m'inscris". J'étais outrée : traiter comme ça l'enseignement dispensé par mon cher maître Mr Lutaud, j'ai donc eu des réticences à l'égard de ce jeune homme. Cela dit, il y a eu très vite des événements : un très grand professeur de géologie, le professeur Michel Levy, a été interdit d'enseigner. Je crois que mon patron a été un des seuls à protester auprès du Doyen de la faculté, tout le monde se taisait. Et puis il y a eu le 11 novembre, auquel je n'ai pas participé, où des étudiants ont été arrêtés. On a fermé la Sorbonne.

D. V. : Est-ce que des camarades à vous y ont participé ?

H. V. : Non, personne. Moi, ce que je faisais à l'époque, c'était écrire des tracts. Je ne savais pas taper à la machine mais je tapais sur la vieille machine du laboratoire et je me faisais des tracts pour moi toute seule : "Français, relevez la tête, ne vous abaissez pas devant les Allemands".

F. T. : Et vous les distribuiez comment ?

H. V. : Moi toute seule. J'en faisais 5 à la fois, je les tapais - je n'avais pas de photocopieuse - et je les mettais dans les boîtes aux lettres. J'en faisais comme cela autant que je pouvais, dès que j'avais un moment de libre, parce que j'avais une chambre à la Sorbonne. En 1939 on avait demandé des volontaires en cas d'incendie et j'avais accepté, ce qui fait que j'avais une clé de la Sorbonne, ce qui nous a bien servi. Pendant toute l'année 1939, j'ai dormi là et quand les étudiants étaient partis, je pouvais taper à la machine et je faisais mes tracts. Je ne mangeais pas, enfin de moins en moins, le peu qu'on avait, et sans faire la queue ce n'était pas évident. Donc j'étais déprimée. La nuit dans la rue, je pleurais : de voir toutes les fenêtres obscurcies, ça me mettait dans un état de déprime et ça allait de mal en pis jusqu'au jour où j'ai été invitée par des gens qui avaient le moyen de faire des échanges. J'ai eu un vrai repas d'avant-guerre, mon moral est revenu et j'ai compris qu'il fallait manger. Il faut se débrouiller pour manger sinon on perd le moral et cela ne sert à rien ni à personne. Cela été un début de lumière dans ma tête.

D. V. : Vous vous êtes ressaisie au physique parce que moralement vous étiez déjà ressaisie.

H. V. : Oui.

F. T. : Et quels ont été les premiers actes de " résistance" ?

H. V. : Et bien finalement, c'est Philippe qui en a été responsable indirectement. Parce que ce garçon croyait à Pétain, il disait qu'il y avait une ambassade américaine, donc inévitablement les Américains un jour ou l'autre entreraient dans la guerre et chasseraient les Allemands et Pétain était dans le coup. Moi, je n'y croyais pas un instant, le patron non plus. Il y avait de grosses discussions après les travaux pratiques que je faisais et on discutait beaucoup, très ouvertement. Il n'y avait aucune illusion à avoir sur l'avis de Mr. Lutaud, parce qu'il avait commencé son premier cours en expliquant les beautés physiques de la France et en disant : "il n'est pas étonnant qu'un pays aussi varié et riche au point de vue agricole, au point de vue touristique ait toujours suscité l'envie de ses voisins". Les étudiants applaudissaient, mais c'était dangereux [...].

Au début je n'ai rien fait du tout. Que des actes isolés : Mr. Lutaud m'a demandé si je pouvais cacher une thèse publiée par notre laboratoire, qui était sur la géologie de la Syrie et du Liban. Mr Lutaud - il était très intelligent aussi - a dit : "il va y avoir une guerre en Syrie et au Liban, par conséquent il faut que vous cachiez ça, les Allemands en auront besoin". Alors je l'ai emmenée chez moi à bicyclette et je l'ai cachée sous mon lit.

D. V. : Et après, avec Philippe ?

H. V. : Il m'exaspérait et pendant une excursion géologique, au début de l'année en janvier, je l'ai un peu engueulé en lui disant : "vous parlez bien, vous parlez toujours du patriotisme mais moi, mes amis patriotes sont tous partis, ils ont rejoint ou non l'Angleterre mais en tout cas ils sont partis pour y aller et vous, vous êtes ici à ne rien faire". (Court silence avant de donner la réponse de Philippe) : "C'est ici qu'il faut se battre, c'est bien plus difficile, mais c'est ici qu'il faut se battre ; et que diriez-vous d'un journal clandestin ?".

F. T. : Janvier 1941 ?

H. V. : Oui. Alors j'ai demandé pourquoi, ce que c'était. Il m'a parlé d'un journal publiée en 14-18 en Belgique, La libre Belgique. Et il m'a dit : "voilà, ils ont fait ça, cela a fait énormément pour le moral des Belges et je veux faire la même chose". J'ai dit oui et j'ai été chargée de la diffusion.

D. V. : D'abord la confection ?

H. V. : Non, non tout de suite la diffusion. J'ai cherché d'abord une ancienne éclaireuse, Marianne Cornevin. Parce qu'elle était protestante, je savais qu'elle était très rigoureuse, j'avais toute confiance en elle. Je lui ai demandé de façon très grandiloquente, elle a accepté très simplement. J'ai demandé à une fille qui était étudiante au laboratoire et enfin à une amie qui s'appelle Génia. Et mon amie m'a répondu : "non, moi je ne veux pas faire de résistance, je n'y crois pas mais je veux bien vous aider". Elle est restée jusqu'à la fin, mais elle a toujours dit non. En cours de route elle nous a dit : "vous savez, vous aurez de la chance si on ne vous arrête pas à la Libération". Elle avait plus de recul que nous mais elle nous a toujours aidés, elle a fait partie du comité directeur, elle a fait les liaisons, elle nous a alimentés, elle se débrouillait d'une manière fantastique [...]. On allait chez ses parents, ils cachaient des juifs, ils étaient tous dans le coup mais ils n'étaient pas résistants, ils faisaient ça comme on respire, c'était très naturel pour eux.

Après ça ont commencé les choses matérielles. Philippe avait trouvé de l'argent par un industriel, Mr. Lebon. Son idée était de ne pas demander à des imprimeurs, mais d'imprimer nous mêmes en apprenant le métier, parce que les imprimeurs étaient trop surveillés. Il a donc décidé d'acheter une machine tchèque qui s'appelait une rotaprint et Mr. Lebon a financé l'achat avec des faux papiers, les premiers faux papiers qu'on a fait fabriquer par des amis. Mr. Lebon en a acheté une autre pour son usine (le gaz et l'électricité Lebon, rue de Rome à Paris), ce qui permettait d'avoir du matériel, car tout était contrôlé. L'encre , les stencils en aluminium, les produits, tout était particulier pour cette machine. On savait d'avance que notre machine achetée, il fallait la planquer quelque part et nous approvisionner en matériel chez Monsieur Lebon et c'est ce qu'on a fait. Pour acheter la machine, j'ai pris une fausse identité, une adresse dans un hôtel, rue Lhomond . J'y suis restée le temps que notre machine soit livrée, qu'on puisse vérifier que je recevais du courrier à cette adresse là. Le lendemain de la livraison, on l'a emmenée ailleurs et heureusement, parce que la police est venue voir dans la semaine qui suivait. Tout était surveillé !

D. V. : Alors Hélène, qu'elles étaient vos tâches plus précises ? La diffusion ?

H. V. : Au début, tout, parce que nous étions très peu nombreux. J'ai transporté par exemple cette fameuse machine : Philippe avait acheté un tandem et on l'a remorquée.

D. V. : Est-ce que vous avez l'impression qu'il y avait des tâches spécifiquement féminines dès le début ? Et comment se faisait la répartition des rôles ?

H. V. : Non, il n'y avait pas de tâches spécifiquement féminines parce que mon mari, enfin celui qui allait devenir mon mari, était très féministe, il n'était pas du tout misogyne. Pour lui une femme équivalait à un homme mais c'est nous qui n'étions pas prêtes. Aux premières réunions de rédaction il y avait Robert Salmon qui était le premier que Philippe avait recruté. Moi j'étais la deuxième, donc j'étais le numéro 3. Et c'était Robert Salmon le plus intelligent, le plus avisé de nous trois. Lui n'était pas pétainiste mais ne s'opposait pas avec violence à Philippe. Il avait dit : "on va faire un numéro sur l'Alsace", le numéro 1 sur l'Alsace. Moi j'étais en désaccord avec Robert Salmon sur un point - tous les Alsaciens sont pro-français - et je lui ai dit pendant la réunion : "vous savez bien que ce n'est pas vrai, il y a des Alsaciens qui sont pro-allemands". Il m'a répondu : "mais ma chère Hélène , vous savez bien que j'aurais pu écrire le contraire avec autant de conviction". Hum! Je l'ai trouvé épouvantable mais croyez-vous que j'aurais proposé d'écrire quelque chose, moi, avec tous les tracts que j'avais faits avant ? Il ne me venait pas à l'esprit de les donner, parce que Salmon était un normalien, Philippe était un philosophe, moi j'étais scientifique.

F. T. : Est-ce que c'est la matière qui jouait ou le sexe ?

H. V. : Non, je me disais : "je ne suis pas capable".

F. T. : Parce que vous étiez une femme ou parce que vous étiez une scientifique ?

H. V. : Parce que j'étais une scientifique d'abord, je pense.

F. T. : Plus que parce que vous étiez une femme ?

H. V. : Non, je ne suis pas sûre. Non, parce qu'en voyant les choses longtemps après, je me suis rendu compte qu'aucune de nous... D'autres littéraires se sont jointes à nous après, comme Jacqueline Pardon qui était largement capable d'écrire : elle préparait une licence de philo, elle était toujours première en français. Jamais elle n'a écrit une ligne, elle analysait les écrits des autres mais elle ne pensait pas à écrire. Aucune de nous n'a jamais eu l'idée d'écrire.

F. T. : Tous les articles de Défense de la France ont-ils été écrits par des hommes ?

H. V. : Oui, au début surtout, parce qu'il y a eu quelques articles écrits par des femmes.

D. V. : Oui, Geneviève de Gaulle en a écrit mais c'était en 1943, très tard. Quel était le pourcentage d'hommes et de femmes ?

H. V. : Au début, il y avait beaucoup de femmes, parce que c'est moi qui étais chargée de la diffusion et j'ai beaucoup recruté de femmes. Puis les hommes étaient partis. Ceux à qui j'aurais pu penser étaient prisonniers ou partis en Angleterre, il aurait fallu en connaître d'autres et on ne les connaissait pas.

D. V. : J'ai eu l'impression par rapport à d'autres mouvements de Résistance que Défense de la France était un mouvement de jeunes, d'étudiants et un mouvement où il y avait beaucoup de femmes.

H. V. : Philippe et moi nous avions 23 ans et nous étions les plus âgés, sauf Salmon qui devait avoir 23 ans lui aussi. Donc c'était très jeune et c'est resté jeune jusqu'au bout. Mais je pense que les femmes avaient encore une mentalité d'avant la guerre de 1914, on trouvait normal de repasser les chemises des hommes et de recoudre les boutons, alors que les jeunes femmes de maintenant refusent de faire ça.

F. T. : Est-ce que vous pensez que la Résistance changeait les rapports entre hommes et femmes, au moment où vous y étiez ?

H. V. : Ça les changeait en ce sens où nous savions qu'on risquait notre vie. C'était très dangereux donc ça créait des liens très forts. C'était une telle confiance les uns dans les autres. Par exemple la fille qui s'appelle Charlotte Nadel et que j'avais recrutée dans le laboratoire, je n'aurais jamais été son amie sans ça. Et elle est devenue une amie que je fréquente encore maintenant, parce qu'implicitement elle avait accepté de risquer sa vie pour les mêmes choses que nous [...].

D. V. : Et par rapport aux étudiants est-ce que cela a changé quelque chose ?

H. V. : Je ne sais pas parce qu'en fait nous avons vécu dans une tour d'ivoire, entre amis et dans un milieu hyper-protégé finalement par ses liens. Chaque fois qu'on en recrutait un, il faisait partie du groupe et devenait un ami et à partir de là on ne voyait plus les autres.

[...]

D. V. : On ne vous a pas demandé qu'elle était votre religion ? Est-ce que vous aviez une religion ?

H. V. : Je n'avais pas de religion. Ma mère était fille de pope en Sibérie ; dans une famille de 12 enfants, elle était la septième. C'était une famille pauvre, mais ils sont tous allés au Collège Impérial parce qu'il y avait des bourses pour les enfants de pope. Ils en sont tous sortis avec le prix d'excellence et les douze ont vécu jusqu'à l'âge de faire des études supérieures. Ma mère avait pris le dégoût de la religion parce que, tous les matins levée à 5 heures et deux heures de chants, de prières et de messes et puis un enseignement étroit (...). Elle ne m'a pas fait baptiser et quand j'ai eu douze ans, elle m'a proposé d'aller suivre un enseignement auprès d'un pope (...)qui me faisait lire l'évangile en russe, ce qui était très difficile pour moi. Mais je l'avais lu en français, je connaissais tout ce qu'il voulait m'apprendre et au bout de deux mois j'ai dit à ma mère que je ne voulais pas continuer. Donc, je suis restée athée. C'est un des problèmes que j'ai eu d'ailleurs quand j'ai fait la connaissance de Philippe Viannay. Lui était très croyant, très pratiquant, catholique très fervent, il avait même été au séminaire, c'était très important pour lui. Chaque fois qu'il entrait dans une église pour prier, je pleurais en me disant "voilà ma rivale !". Ça c'est arrangé par la suite. [...]

F. T. : Oui, les rapports hommes-femmes au quotidien ont-ils été changés pendant la Résistance ? Quel était votre quotidien? Où dormiez vous ? Où mangiez vous ?

H. V. : Je ne m'en souviens pas.

D. V. : Vous nous avez dit que vous ne faisiez pas la queue. Sans faire la queue, comment est-ce que vous mangiez ?

H. V. : Il y avaient des restaurants étudiants où on ne payait pas très cher et où on mangeait quand même un peu. Et la deuxième année - ça devait être en 1941 - mon patron m'a dit : "mon enfant - je l'appelais `patron', il m'appelait `mon enfant' -, je vous propose de déjeuner avec moi au laboratoire, j'ai des nouilles". Il avait une caisse de vin, c'était du Pommard. Je ne buvais que de l'eau, je n'avais jamais bu de vin et j'ai découvert que ça pouvait être délicieux. Les nouilles à l'eau et le Pommard de 1917 - je m'en souviens, c'est mon année de naissance - c'était extraordinaire ! Par la suite avec Philippe, à bicyclette, nous sommes souvent allés dans les fermes. Par sa sœur Bénédictine, il y avait des réseaux et on nous donnait des œufs : ça changeait, c'était merveilleux, c'était des choses à manger. J'avais des amis fermiers qui de temps en temps m'envoyaient de bons rutabagas, des pommes de terre mais c'était rare. Philippe avait aussi un frère agriculteur [...] en Normandie qui nous envoyait du beurre, ce qui était miraculeux. Sinon je ne me souviens pas. En dehors des nouilles à l'eau avec le Pommard et des quelques colis, je crois que c'était les foyers.

D. V. : Quand vous êtes-vous mariée avec Philippe ?

H. V. : Nous nous sommes mariés en 42. Mais avant, voici ce que nous avons fait. Puisque nous étions très peu nombreux au départ et qu'il y avait cette fameuse machine, il a fallu imprimer. Avant la Sorbonne, nous sommes allés chez un camarade qui s'appelait Louis Pascano. Sa mère habitait une maison Passage Saint-Jacques, on a installé la machine là-bas et au début nous avons imprimé chez elle, ce qui était bien courageux de sa part. Un jour, elle nous a demandé de partir en disant : "écoutez je trouve que ça fait trop d'allées et venues, ça fait beaucoup de jeunes" [...]. De chez elle, nous sommes allés chez les parents de Philippe qui n'étaient pas là. Sa mère était morte, son père était à la campagne, dans leur maison de province et l'appartement était vide. Philippe a prévenu un de ses frères qui était militaire, Pierre Viannay. Nous imprimions dans la salle de bains. Un jour, Pierre est venu nous dire : "il faut que vous déménagiez, je suis sûr que vous êtes dénoncés". Je me suis dit : " il a peur, on ne peut pas rester chez quelqu'un qui a peur, partons". En fait il avait raison, huit jours après il y a eu perquisition, il ne restait plus rien heureusement. C'est étonnant ! Cela nous est arrivé plusieurs fois. C'est arrivé plusieurs fois à Philippe de dire : "je sens que nous sommes dénoncés, il faut partir", et c'était vrai. Nous sommes partis et c'est là que nous sommes allés à la Sorbonne.

D. V. : Et là vous êtes restés assez longtemps.

H. V. : Nous sommes restés assez longtemps, oui. J'avais la clé de la Sorbonne. À cause des couvre-feux et du fait que nous n'avions jamais fini - parce que nous étions de mauvais imprimeurs, que Philippe avait mal appris, que la machine était difficile à manier -, nous restions toute la nuit jusqu'à 5 heures du matin dans ces caves de la Sorbonne. Après il fallait tout nettoyer, remettre en ordre, monter au labo, nous laver rapidement. Je me souviens qu'après ça, nous allions au bistrot boire un ersatz de café à la saccharine et puis on allait dormir chacun chez soi pendant deux heures, pour reprendre le travail de la journée. Nous faisions cela trois nuits par semaine, c'était une époque très très très fatigante. Fatigante, parce que nous étions de mauvais ouvriers, on ne savait pas utiliser cette machine qui était très moderne pour l'époque.

F. T. : Et vous le tiriez à combien d'exemplaires ?

H. V. : Au début 3 000 à 5 000. Il y a eu deux versions, il y a une première version qui s'est faite chez mes amis Bottin, qui avaient une usine de chocolat près de Paris. Là sur la ronéo de l'usine, on a fait le tout premier tract qui est paru avant le premier numéro officiel : c'était au mois d'avril 1941. Après on a essayé de faire mieux, d'imprimer de nouveau sur notre machine ce numéro sur l'Alsace du 14 juillet 1941. Quelqu'un a dit que c'était au mois d'août mais je crois bien que c'était au mois de juillet.

D. V. : Oui, c'est bien le 14 juillet 1941.

H. V. : Si vous voulez, il y avait eu un numéro zéro en avril, tiré à 3 000 exemplaires. C'était élégant de nous abriter comme cela, il faut dire que le père en question a fait du renseignement, il était en liaison avec Londres, il prenait des risques et ensuite deux de ses filles nous ont aidés. Voilà, c'était une époque fatiguante et usante, mais dont on a gardé un bon souvenir. (...) Puis il a fallu déménager de la Sorbonne. Un jour nous étions tous les trois, Louis Pascano, Philippe et moi - on était deux à avoir des sacs à dos avec le papier blanc - et arrivés devant la porte de la Sorbonne par laquelle nous passions, il y avait une femme qui était là. Nous avons continué notre chemin sans nous arrêter et elle nous a suivis. Alors Philippe m'a dit : "pars, elle va nous suivre nous, nous nous séparerons plus tard". Cela a pris deux heures parce qu'il y avait des relais. Elle est passée devant un café et deux hommes l'ont remplacée. Moi j'étais à l'abri, mais je me demandais comment cela se terminerait. Donc il a fallu déménager en 1942. Après nous avons compris, nous avons deviné que c'était à cause d'un autre journal clandestin imprimé à la Sorbonne, l' Université libre[...]. Nous avons déménagé péniblement de la Sorbonne. Là, nous avons loué un appartement rue Gazan, nous l'avons insonorisé : on a acheté des plaques de liège et on a loué un piano. Une de mes amies est venue jouer du piano et j'ai demandé aux voisins si le piano gênait, ils n'entendaient rien du tout, donc notre machine ne gênait pas et nous avons imprimé là quelques mois. Mais tout ça, c'était folklorique. À partir du moment où nous avons reçu un appui massif de jeunes gens, par les Volontaires de la liberté de Jacques Lusseyran, le tirage est passé de 10 000 à 100 000 en quelques semaines et nos machines ne suffisaient absolument pas. Donc il a fallu d'autres machines, d'autres locaux et passer à une échelle industrielle.

D. V. : Mais toujours à Paris ou vous avez décentralisé ?

H. V. : Non, c'était tout à Paris. Il y a eu un accord avec Combat, beaucoup plus tard en 1943. Nous imprimions 100 000 exemplaires de Combat et Combat imprimait 100 000 exemplaires de Défense de la France en zone sud. Il y avait un besoin immense, les gens demandaient toujours plus de journaux. On n'a pas tiré jusqu'à 400 000 exemplaires, sans que cela ne corresponde à un besoin.

D. V. : Est-ce que c'est à ce moment là que vous avez commencé tous les faux papiers ?

H. V. : Au début, les faux papiers c'était artisanal, pas très brillant - des cachets volés à droite et à gauche. Jusqu'au moment où nous nous sommes rendus compte qu'il en fallait vraiment beaucoup plus pour cacher les juifs. Cela a commencé l'été 1942, où on s'est dit qu'il fallait faire quelque chose. Et c'est un libraire juif, qui vivait caché chez son amie, qui nous a proposé de passer à l'échelle industrielle et d'organiser un atelier de faux. Il a étudié des procédés.

F. T. : Il l'a fait seul ou bien d'autres pouvaient l'aider ?

H. V. : On lui apportait tout. Il y avait par exemple un photograveur qui s'appelait Courmont ; on lui apportait des modèles qu'il photogravait et à partir de la photogravure, Michel Bernstein avait trouvé le procédé - avec une presse à caoutchouc - pour reproduire très bien. Comme c'était un juif libraire spécialisé dans la littérature révolutionnaire remontant aux prémices des révolutionnaires anglais, il avait l'habitude des grimoires. Il était très méticuleux, donc c'est un travail qui lui convenait à la perfection. Il a proposé avec une intelligence extraordinaire de faire des documents complets et il était très vigilant pour tous les détails.

F. T. : Et vous, étiez-vous en relation avec lui ou pas du tout ? Est-ce que cela a fait partie de vos tâches ?

H. V. : On a envoyé une seule personne chez lui. Moi, je savais où c'était mais je n'y ai jamais mis les pieds, sauf tout à fait à la fin.

D. V. : Et est-ce qu'il y a des agentes de liaison qui y sont allées ? Des femmes ?

H. V. : Uniquement Génia qui s'appelait Génia Deschamps à l'époque. Il n'y avait que Génia qui allait chez eux, personne d'autre.

D. V. : Et le rôle d'agente de liaison, était-il plus confié à des femmes qu'à des hommes ?

H. V. : Je ne sais pas, parce qu'on n'a jamais appelé ça agent de liaison. Je pense qu'il y en a eu et c'étaient plutôt des femmes, mais Philippe assurait aussi des liaisons.

D. V. : Donc on ne peut pas dire que c'était un rôle plus spécifiquement féminin.

H. V. : Non. Et ce qu'on appelle "boîtes aux lettres", pour nous, c'étaient des dépôts de journaux.

D. V. : Là c'était aussi bien des femmes que des hommes ...

H. V. : C'était aussi bien une marchande, un gars, n'importe qui. Tout de même, il y a eu plus de femmes que d'hommes pour ce genre de chose parce que, je répète, il y avait un million et demi d'hommes prisonniers. On n'allait pas demander cela aux très vieux, ni aux très jeunes, il n'y avait pas beaucoup d'hommes d'âge moyen [...]. Finalement on a demandé souvent à des femmes de servir de dépôt mais il y avait aussi des hommes.

F. T. : Et quand vous avez été mariée, est-ce que cela a changé quelque chose dans le rôle que vous avez toujours tenu à Défense de la France ou pas ?

H. V. : Au début, non. Sauf peut-être dans l'esprit de certains. Pour Jacques Lusseyran par exemple, qui était plus jeune que nous, j'étais un mythe et en plus j'ai eu l'intelligence de mettre mon bébé au monde le 14 juillet 1943. Il faut reconnaître que c'était merveilleux : le premier bébé de notre mouvement de résistance était né un 14 juillet ! Puis ils ont été arrêtés le 20 juillet, donc on n'a pas eu le temps de se réjouir bien longtemps. Mais au départ, c'était quelque chose d'extraordinaire, parce que j'étais la femme de Philippe et que Philippe était le grand patron... Pour les autres, ça n'a rien changé, pour les anciens amis non plus. En fait, ils ont tous considéré que c'était une régularisation, on nous voyait toujours ensemble. Malgré l'époque, nous étions tous très chastes, très discrets et très puritains.

D. V. : Et après, avec ce bébé, vous êtes quand même partie vous cacher ?

H. V. : Après, oui. Le 20 juillet j'étais à la clinique. Vous savez, les transmissions de pensée ça existe ! J'étais dans cette clinique depuis le 14 juillet, il n'y avait pas le téléphone dans les chambres et voilà que le 20 juillet au matin, le téléphone sonne en bas et je me suis dit : "ça, c'est la Gestapo !". Je prends mon bébé, je le prends dans mon lit et je lui dis : " mon Dieu, mon Dieu, est-ce que je te reconnaîtrai, si on nous sépare ?". Je regardais ses doigts, ses orteils, ses ongles... C'était la femme de ménage de mon beau père qui était passée à Neuilly, qui avait vu que ma belle-sœur était arrêtée, qu'on cherchait Philippe et qui me prévenait de déménager. Elle n'a pas dit tout cela mais simplement : "Pouvez-vous dire à Madame Viannay qu'elle doit partir aujourd'hui même". Le directeur est monté, furieux, me dire : "comment ! (à l'époque on restait 15 jours en clinique, là il n'y avait que 6 jours), une dame a téléphoné pour dire qu'il faut que vous partiez tout de suite, de la part de votre mari". J'ai répondu : " bon je pars, pouvez vous m'appeler une ambulance ?".

F. T. : Et où êtes-vous allée ?

H. V. : Je suis allée chez mon amie Bottin, dont le père avait l'usine de chocolat, et qui était une camarade depuis la sixième. Philippe nous a rejoints là et le lendemain matin, elle nous a dit : "je ne peux pas vous garder, j'ai trop peur". Avec mon intransigeance de l'époque, je ne lui ai plus jamais parlé, j'ai trouvé ça monstrueux. En fait, elle avait raison : à la clinique, j'étais sous mon nom et on cherchait Philippe Viannay qui avait une sœur, Clotilde Viannay, arrêtée, un frère, Hubert Viannay, arrêté. Le traître savait que j'étais enceinte, donc on aurait pu chercher. La police ne l'a pas fait mais... [...]. Je nourrissais cet enfant mais, à partir du moment où vous dites "c'est la Gestapo", et bien il n'y a plus de lait. Personne n'avait de lait, on lui donnait de l'eau sucrée et il passait son temps à hurler, il fallait absolument trouver une solution. Philippe avait rendez-vous avec Mr. Lebon et une amie de Mr. Lebon à midi ce jour là, le 21 donc, et il leur a dit : "trouvez moi un endroit où mettre Hélène et le bébé". Alors on a trouvé Marie-Hélène Lefaucheux. On est parti en vélo-taxi, avec un gars en vélo devant avec des revolvers et un autre derrière avec des revolvers aussi, au cas où... Nous sommes arrivés sans inconvénient chez Madame Lefaucheux. Ce soir là, le père de Philippe rentrait à Paris, il allait se rendre à Neuilly si on ne l'arrêtait pas à la gare. Philippe a donc décidé d'aller le chercher à la gare, et, pour le cacher, il n'a trouvé rien de mieux que de l'emmener chez Grou-Radenez, un imprimeur qui avait 5 enfants. Rien de plus sûr ! Il a été arrêté par la suite, il est mort en déportation, mais ce n'était pas lié à cela.

D. V. : Vous n'êtes pas restée tout le temps chez Marie-Hélène ?

H. V. : Non. J'étais chez Marie-Hélène Lefaucheux, minuit sonne, c'était le couvre-feu, Philippe n'était pas rentré. Elle est venue auprès de moi - elle était extraordinaire cette femme - et elle m'a dit : "vous vous inquiétez pour Philippe, mais ne vous inquiétez pas, au-dessus de votre tête il y a 5 américains....". Cette femme a eu un rôle fantastique, c'étaient des gens fantastiques... La femme que Philippe avait rencontrée à midi a trouvé quelqu'un d'autre, on a emmené le bébé dans une ferme où il y avait une chèvre et du lait de ferme. Mon petit garçon était brun aux yeux noirs et très brun de peau. Une laveuse vint chez cette dame, qui avait une très grande propriété à la campagne, à Verneuil sur Seine, et dit en voyant mon bébé : "il est brun ce petit". Comme j'étais blonde aux yeux bleus et qu'elle n'avait jamais vu son père, elle trouvait cela surprenant et je me suis dit : " elle pense que j'ai fauté avec un Noir". C'était merveilleux, on ne pouvait pas rêver meilleur abri pour soi. Je me suis dit : "elle va aller répéter partout : il y a une fille-mère qui a fauté avec un Noir et qui se cache".

F. T. : Et vous,avez -vous repris vos activités ?

H. V. : Je ne les ai pas vraiment abandonnées mais je n'ai pas repris d'activités directes. Je n'ai plus assisté au comité directeur, sauf quand il se tenait chez nous. Mais je n'allais pas à d'autres endroits. Il m'est arrivé d'aller voir, avec mon bébé d'ailleurs, la fameuse usine de faux papiers. Parce que j'étais coupée du monde depuis longtemps, on pensait que ce n'était pas dangereux. J'ai pris le train, je suis allée chez eux, on a passé la journée avec ce petit mouflet.

D. V. : Et comment s'est passé, à la fin de la guerre, le retour à "une vie normale" ?

H. V. : Entre temps j'étais quand même allée... - j'étais très inconsciente - j'étais allée rejoindre Philippe dans son atelier.

F. T. : Seule ou avec le bébé ?

H. V. : J'avais laissé le bébé chez des cousins, mais quand j'y ai repensé après... J'ai laissé cet enfant sans un mot. Philippe m'avait écrit : "il faut que tu viennes me rejoindre. J'ai laissé tomber le bébé sans un moment d'hésitation - il n'avait pas un an -, sans le recommander, sans dire "si nous sommes tués...", rien. Je suis partie aussitôt avec mon vélo, le train et j'ai rejoint Philippe. Un jour où nous avons failli être tués tous les deux, vraiment, je me suis dit : " Pierrot va rester orphelin", sans plus. Il y avait un Allemand dans notre dos avec un fusil mitrailleur et il ne l'a pas tourné contre nous. Pourquoi ? Je n'en sais rien. Il était derrière une meule, nous derrière une autre, nous débusquons à trois : Philippe avec son revolver à la main, moi le sac à dos avec le poste anglais et de l'argent, et la troisième qui portait quelques bricoles personnelles. Nous n'avions pas le droit d'être là, le couvre-feu était féroce et l'Allemand avait un fusil mitrailleur. On le voit, il nous voit et il n'a pas tiré. Et, bien longtemps après, je me suis dit que j'avais abandonné mon bébé comme ça, sans un mot. C'est dingue, ce n'est pas des choses dont je suis fière et mon fils le sait. Il a bien trouvé qu'au début j'étais vraiment inconsciente et pas très maternelle. Voilà...

D. V. : Oui, mais je crois que les circonstances étaient tout à fait exceptionnelles et qu'on ne pouvait pas avoir un comportement tout à fait normal.

H. V. : Oui, ça dépend des gens.

[...]

D. V. : Début 1945, c'était une époque intermédiaire où finalement on a quelques fois plus souffert que pendant la guerre. La guerre n'était pas terminée.

H. V. : Personnellement, ce n'était pas le cas, parce que nous avions de l'argent. Philippe pendant quelque temps - six mois - a été député à l'Assemblée provisoire, cela nous donnait de l'argent. De plus, il était l'un des directeurs de France Soir, jusqu'à ce que nous en soyons éliminés. Nous étions bien plus riches que la plupart des gens et malgré tout, quand on avait de l'argent, on pouvait acheter des choses, de temps en temps aller au restaurant ou faire des trucs que tout le monde ne pouvait pas faire... Par contre, je me suis trouvée dans un état de grand épuisement nerveux. Je me disais que nous devrions avoir droit à un an de vacances. C'était vraiment l'impression que j'avais. Dormons !

F. T. : Quand on a donné le droit de vote aux femmes, quelle a été votre réaction ?

H. V. : Cela m'a paru tout à fait normal, ça prouvait qu'on avait eu raison de faire la guerre, de faire de la résistance. C'était la justification mais c'est tout. Ce n'était pas un grand élan. Je ne me souviens même pas du premier jour où j'ai voté.

D. V. : C'était pour les municipales d'avril 1945.

H. V. : Et j'ai commencé à voter, depuis cette époque là, pour des gens qui n'étaient jamais élus jusqu'en 1981. Je votais toujours à gauche, toujours contre de Gaulle et les candidats ne passaient jamais ; ce vote était un acte de foi qui disait : "ça ne sert à rien mais je vote". Le droit de vote nous avait été donné, il fallait s'en servir mais en sachant que mon candidat ne passerait jamais.

F. T. : Est-ce que vous avez repris votre travail ?

H. V. : Non, je n'ai rien repris du tout, j'ai attendu un autre enfant mais on était vraiment fatigué. C'est une époque un peu vide, vide de l'attente du retour ou pas des autres.

D. V. : Il y avait beaucoup de camarades de Défense de la France partis en déportation.

H. V. : Oui, il y avait quand même eu 80 arrestations, dont le frère de Philippe. La guerre n'était pas finie et tout le monde l'oubliait. Les gens continuaient à se faire tuer, à se battre et on ne pensait qu'à revivre chacun pour soi. C'était très éprouvant cette époque, pas joyeuse... Cela aurait dû être heureux mais ça ne l'était pas.

D. V. : Et après, longtemps après, est-ce que vous avez milité dans une association d'anciennes résistantes ? Ou à Défense de la France est-ce que vous avez monté quelque chose ? Quel a été votre rôle ?

H. V. : A partir de là, je suivais comme un toutou. J'ai perdu beaucoup de personnalité et c'est Philippe qui a pris les initiatives. C'est lui qui a fondé l'Association des anciens de Défense de la France, il fallait bien le faire. Moi j'y allais régulièrement, il fallait une secrétaire. Il fallait s'occuper des dossiers, de la mise en ordre, de faire des attestations à tous ceux qui le demandaient, retrouver les gens, préparer les décorations. Il y avait un gros travail matériel à faire. J'y ai participé beaucoup mais je n'en ai pas pris l'initiative. Chaque année, on faisait un arbre de Noèl et j'avais horreur de ça. Cela m'exaspérait mais j'avais tort, parce que ça créait des relations entre les gens. Je trouvais que c'était de l'argent gaspillé, qui aurait mieux servi. C'était cher : il fallait louer une salle, acheter l'arbre, faire des cadeaux à chacun, tenir les fichiers, c'était un énorme travail mais je n'avais pas mesuré à quel point cela créait des liens. Encore maintenant on dit : "les arbres de Noël de Défense de la France, c'était merveilleux". J'étais trop puritaine pour cela.

D. V. : Moi, ce qui me frappe, c'est l'esprit de camaraderie qui reste entre les gens de Défense de la France.

H. V. : Oui, beaucoup. Vous le sentez très fort ?

D. V. : Oui, je le sens très fort entre Jacqueline, Charlotte...

H. V. : Oui, très fort, parce que nous avons été mal reconnus, mal aimés, pas du tout respectés pour tout ce que nous avions fait. On a toujours négligé, officiellement, ce que nous avons fait. Ce n'est que récemment que l'on parle de Défense de la France. Par exemple, à la France Libre à Londres, on n'a jamais cité nos articles, on a donné une fois le nom de Défense de la France au cours d'une émission. Nous n'étions pas très aimés. Quand il y avait des distributions d'argent, c'est nous qui en avions le moins. Quand on a créé le CNR, nous n'y étions pas. Je pense que cela crée des liens. Lors de la Libération, le Général De Gaulle a généreusement offert une Croix de la Libération pour le mouvement Défense de la France, une! Il y en a quand même eu plusieurs centaines distribuées à droite et à gauche.

D. V. : Oui, cela dit, il y a quand même une différence entre la France Libre et puis la Résistance de l'intérieur ; je veux dire que l'essentiel des décorations a été attribué aux Français libres.

H. V. : Oui, mais il y en a eu plusieurs à Franc-tireur... Alors, Philippe allait se la donner lui-même ?

D. V. : Vous savez, à Franc-tireur il y en a eu trois.

H. V. : Au moins trois. Mais là, ce n'est pas possible. Quand vous êtes le patron, vous n'allez pas vous décorer vous-même. De Gaulle aurait au moins pu avoir le geste de les décorer lui-même [...]. Mais nous n'avions pas fait de résistance pour cela . Nous ne voulions même pas donner de renseignements à ceux qui venaient nous interroger. Quand Madame Granet est venue nous poser des questions sur ce que nous avions fait, beaucoup ont refusé de répondre : "je ne l'ai pas fait pour qu'on parle de nous". C'est le cas de Jacqueline Pardon, elle n'a pas voulu témoigner. Moi, je n'ai pas tout à fait refusé mais nous n'avions pas très envie de donner beaucoup de détails, parce que nous avons fait ce que nous estimions devoir faire. Il fallait faire quelque chose et puis après c'était fini, on tournait la page et on parlait de l'avenir et d'autres choses.

D. V. : Cela ne vous fatigue pas trop Hélène ? On a encore deux ou trois petites questions à vous poser.

H. V. : Non. J'aimerais dire encore quelque chose sur les faux papiers. Michel Bernstein et sa femme avaient mis au point des dossiers complets, y compris un manuel des faussaires expliquant la façon de s'en servir, avec énormément de détails. Nous en fournissions un peu partout, il y avait des centrales de faux papiers un peu partout, dans l'Est, en Bretagne. Les gens savaient à peine d'où ça venait. Entre autres, Philippe avait trouvé le moyen de donner des dossiers de faux papiers à Yves Farge pour qu'il les porte en zone Sud et jamais, dans les documents qui parlent d'Yves Farge, on n'a lu qu'il avait transmis des faux papiers venant de Défense de la France. J'ai lu le rapport de Plutus qui explique où étaient fabriqués les faux papiers : ils en fabriquaient eux-mêmes, ils en recevaient de je ne sais plus qui et ils en recevaient de Londres. Yves Farge disait que ça venait de Londres, il ne disait pas que ça venait de Défense de la France. Ce qui fait que j'ai eu des discussions très violentes avec Lucie Aubrac, persuadée que c'était eux, la centrale de faux papiers la plus importante et qui fournissait tout le monde. Et bien non, c'était la nôtre sans aucun doute. [...] J'en avais une preuve, Michel Berstein est toujours vivant. Un jour il a alerté Philippe, parce que dans des documents de faux papiers venant de Lyon, il y avait une faute dans un des papiers, [...] il y avait une lettre qui était imprimée de travers et les gens de Lyon ne l'avaient pas vu. Lui, qui était tellement méticuleux, s'en était aperçu. Il avait fait photograver le document, ensuite imprimé par nous avec l'erreur et avait dit à Philippe : "attention les gens de Lyon n'ont pas remarqué que...". Après c'est retourné à Lyon mais jamais vous n'aurez la mention d'un échange quelconque de Défense de la France avec Lyon, ils ne savaient pas que ça venait de nous. Je ne leur en veux pas, ils ne le savaient pas.

D. V. : Oui, mais on sait que c'est la centrale la plus importante en faux papiers.

H. V. : Oui, mais j'ai eu du mal à le prouver [...].

F. T. : Vous avez beaucoup parlé de Défense de la France mais aussi de votre rôle de femme dans la Résistance et c'est autour de cela que je voudrais vous posez encore quelques questions. D'abord des questions de détail : est-ce qu'à Défense de la France il y avait beaucoup de mères de famille ? Est-ce que c'était possible pour une femme mariée avec des enfants de jouer un rôle et lequel ?

H. V. : Il y en a eu incidemment. Il y a eu par exemple une épicière que l'on appelait Madame Suzanne, qui avait deux enfants : une fille et un neveu qu'elle avait adopté comme fils. Ces deux ont fait de la résistance avec nous mais c'est elle qui avait commencé ; c'était une mère de famille, je suis encore en relation avec sa fille Christiane. C'était une femme charmante. Comme elle était épicière, c'était facile de porter des journaux chez elle, de sortir avec des paquets. Il y a eu aussi une famille : Étienne Ploix mais là, ce n'était pas un rôle direct. Ces gens avaient 5 enfants et lui faisait passer des prisonniers, faisait franchir la ligne depuis Paris de l'autre côté. Elle n'avait pas un rôle direct mais c'était déjà bien, elle nous prêtait son mari. Je ne vois pas beaucoup de mères de famille ou alors la mère de mon amie Génia, qui recevait chez elle des juifs, des évadés, n'importe qui. Tout ce que sa fille lui ramenait, elle disait toujours oui, elle hébergeait. Je pense que des gens qui hébergeaient, il y en avait beaucoup mais qui n'avaient pas un rôle en tant que tel.

F. T. : Comment se passait très concrètement la distribution d'un numéro ?

H. V. : Au départ, c'était facile parce qu'il n'y en avait pas beaucoup. Chacun en prenait un millier, on les mettait dans des enveloppes. Cela coûtait cher et on hésitait à en faire trop. On les mettait aussi dans les boîtes aux lettres.

D. V. : Oui parce que vous, vous les envoyiez par la poste, ce qui est rarissime. D'habitude, on les dépose dans les boîtes aux lettres.

H. V. : Oui. Surtout, on l'a développé beaucoup, quand on a fabriqué des faux timbres.

F. T. : Et est-ce qu'être femme pouvait faciliter la diffusion ? Est-ce que vous avez des anecdotes sur cette question ?

H. V. : Pas tellement, enfin si. On allait distribuer dans le métro, c'était des opérations de grande envergure. Mais moi, j'en ai diffusé devant les églises. Je l'ai fait à Saint-Pierre de Montrouge et à Saint-Pierre de Chaillot. Vous savez : les gens, vous leur donnez un papier, vous avez l'air convenable, ils prennent le papier et généralement ils ne le jetaient pas par terre. C'était intéressant à faire mais il ne fallait pas rester longtemps. Il y en a aussi qui ont fait de la diffusion en voiture, en jetant les journaux par la fenêtre, mais plus tard. La diffusion du numéro du 14 juillet 1943 a été faite dans le métro. La technique était très étudiée. Il fallait monter une station avant une correspondance, diffuser rapidement dans toute la rame, qu'il y aient des Allemands ou qu'il n'y en aient pas, parce que le temps que les gens lisent, le métro arrive, on descendait et on partait par une correspondance. Les gens adoraient faire cela finalement, parce que c'était faire quelque chose au grand jour. C'est pénible d'être toujours dans l'ombre. Tandis que faire quelque chose au grand jour, c'est comme une annonce de la libération.

D. V. : Et quand vous voulez décrire votre expérience de résistante, est-ce que vous insistez surtout sur l'aspect douloureux, de grande fatigue comme vous l'avez dit tout à l'heure ? Ou aussi sur les aspects d'affirmation de soi, de liberté ?

H. V. : Je dirais surtout d'amitié. La chose que j'en ai tirée, ce sont les liens très forts entre nous. C'est à cela que je pense. Nous vivions dans un monde clos finalement, dans un monde protégé, nous ne voyions que des amis, que des gens sûrs, que des gens que nous aimions beaucoup.

D. V. : Quand vous dites dans un monde protégé, c'est un peu paradoxal.

H. V. : Oui bien sûr.

F. T. : Est-ce que pour vous le fait d'avoir fait de la résistance correspond à une conquête de liberté ou pas du tout ?

D. V. : Est-ce qu'il y a une conscience d'avoir transgressé le rôle que l'on attendait des femmes ?

H. V. : Le rôle des femmes en tant que femmes ?

F. T. : Oui.

H. V. : Je vais vous dire. Cela remonte au lycée où j'étais bonne élève. Et me voilà en Math. Elem., dans un lycée de garçons. Nous étions 3 filles et là je me suis dit : "je vais leur prouver qu'une femme, c'est aussi intelligent qu'un homme". Ça a commencé là pour moi. Effectivement, nous avons été 4 sur 30 à être reçus au bac. de Math. Elem., dont moi. Donc, je leur ai bien prouvé que j'étais au moins aussi intelligente qu'eux. Je trouvais tout naturel qu'une femme soit l'égale d'un homme. En quoi je me trompais sur moi-même, parce que je n'ai jamais eu l'idée d'écrire dans le journal. Je faisais des tracts à moi mais je n'ai jamais eu l'idée d'écrire dans le journal. Nous avons découvert cela, un jour où une Américaine est venue nous interviewer il y a une vingtaine d'années. Elle a fait un livre sur les femmes dans la résistance (Il s'agit de Margaret L. Rossiter et du livre Women in the Resistance, Praeger 1986). Il y avait mon amie Génia, Jacqueline Pardon et moi, et elle nous a demandé tout simplement : "et vous quels articles avez-vous écrit ?". Nous nous sommes regardées toutes les trois, nous avons éclaté de rire et nous avons répondu : "nous n'avons pas écrit et ça ne nous est jamais venu à l'esprit". C'est incroyable et cela prouve à quel point nous étions encore avant la guerre de 14 dans notre éducation, dans notre mentalité. Je me disais : "je vaux les hommes", mais je ne faisais pas la même chose qu'eux. Jamais ils ne nous ont demandé d'écrire mais si nous l'avions proposé comme Geneviève de Gaulle, son article est paru. Si j'avais fait un article dans mon coin, ils l'auraient passé mais je ne me sentais pas à la hauteur.

D. V. : Vous ne pensez pas que pour Geneviève de Gaulle, il y avait le fait que ce soit la nièce du Général et que c'est pour cela qu'ils ont passé l'article ? Parce que son pseudonyme était assez clair, quand on sait qu'elle avait signé Gallia. Je les vois mal en train de refuser un article signé Gallia. On peut se poser la question.

H. V. : On a passé aussi des lettres de jeunes femmes déportées et c'est Philippe qui avait voulu les passer.

D. V. : Vous avez dit que Philippe ne faisait aucune distinction entre femmes et hommes ... "au départ" . Est-ce qu'après il en a fait ?

H. V. : Non, mais je me suis aperçue après coup que nous n'avions pas écrit. Lui n'en faisait pas et si moi j'avais dit : "je veux écrire sur ce sujet là", il aurait passé l'article, j'en suis sûre. Lui était pétainiste, il faisait des articles pétainistes. Moi je n'y croyais pas, vous croyez que j'aurais eu l'idée d'écrire ? Il ne me venait pas à l'esprit non plus qu'un journal puisse présenter des idées différentes. C'est curieux. Pourquoi ? Un manque de liberté d'esprit.

F. T. : Est-ce que vous parliez des lois répressives de Vichy contre les femmes ?

H. V. : Jamais. Nous étions nulles. On n'avait aucune formation politique et je crois que c'était moi qui en avais le plus sur les trois. Nous ne suivions même pas ce que Vichy faisait, on s'en fichait complètement. Pour moi, tout ce que faisait Pétain, c'était les Allemands. Je me trompais, il a fait ses lois anti-juives sans attendre les Allemands. Mais je me disais : "tout ce que fait Pétain, c'est parce que les Allemands sont là, parce que nous avons perdu la guerre, donc chassons les Allemands et Pétain partira avec eux". Vichy n'avait pas d'être pour moi, je ne m'y intéressais pas du tout. C'est pour cela que les gens de zone sud de Franc-Tireur, Combat et Libération étaient bien plus au courant que nous, ils étaient plus mûrs.

D. V. : Leurs articles étaient plus forts politiquement.

H. V. : Et bien oui, parce qu'ils n'avaient pas les Allemands mais ils avaient Pétain. [...]

F. T. : Qu'est-ce que vous diriez de la place de la Résistance dans votre parcours de femme ? Est-ce que cela a été important pour vos choix postérieurs, votre mode de vie, vos relations avec votre mari, votre attitude de mère ?

H. V. : Oui, très important. On a toujours été heureux d'avoir fait ce choix dès le départ et sans hésitation. C'est vrai que ça donnait peut-être un sentiment de supériorité par rapport à ceux qui n'avaient pas voulu choisir mais en même temps cela a aidé toutes nos actions futures, c'est sûr.

D. V. : Plus précisément dans votre rôle de femme ?

H. V. : Je croyais ne pas faire de distinction entre hommes et femmes, en fait j'en ai fait, bien entendu, mais je n'avais pas analysé.

09/04/2010
Auteur : Dominique VEILLON et Lien : Résistances et Libérations France 1940-1945

[Compléter l'article]

Suite de l'interview

F. T. : Vous avez été femme au foyer après la guerre, n'est-ce pas ?

H. V. : Oui, une mauvaise mère au foyer parce que je faisais beaucoup de bénévolat pendant les deux premières années et après il y a eu les Glénans. Mon mari a créé le centre nautique et je m'en suis énormément occupé. Philippe a créé beaucoup de choses après la guerre mais la chose que j'ai trouvé la plus difficile, la plus menacée, la plus fragile ce sont les Glénans parce qu'on avait pas d'argent pour le faire, c'était rejeté par tout le monde et j'avais l'impression de mener un combat qui ressemblait beaucoup à la Résistance sans les dangers de mort. Je pense que si je n'avais pas fait de résistance, on n'aurait pas osé le faire, ni Philippe ni moi, ni quelqu'un d'autre. C'était vraiment audacieux parce que, ne rien connaître à la mer et créer une école de voile en pleine mer, c'était dingue et passionnant et c'est devenu une école qui est la plus importante de France donc du monde parce que c'est en France qu'il y en a le plus.

D. V. : Est-ce que vous entrez dans une association, un mouvement féminin ?

H. V. : Aucun. D'ailleurs je n'ai jamais été sollicitée, je n'ai jamais eu envie d'en faire partie. J'ai manqué de courage et de lucidité dans ce domaine là.

D. V. : Par exemple, je ne vous vois pas à l'ADIR ?

H. V. : Non, parce que je n'ai pas été ni internée ni déportée, c'est une association de résistantes déportées ou internées. C'est à partir du moment où tout le monde a commencé à mourir que nous nous sommes dit : «il faut témoigner de ce que nous avons vécu, il faut en parler aux jeunes qui s'y intéresse ». Alors que la génération de nos enfants ne s'y intéressait pas, nous n'en parlions jamais.

D. V. : Et vous allez dans les collèges ?

H. V. : Maintenant oui, quand on me demande, ce qui est assez rare.

F. T. : J'ai une dernière question qui est un peu difficile à poser : dans la Résistance, il y avait l'envie de chasser les Allemands, mais il y avait aussi l'idée de refaire le monde - que le système social change, que les relations changent - il y avait une utopie des combattants de la Résistance. Et je me demande souvent pourquoi ces idées un peu utopiques sur un avenir meilleur, un monde nouveau, des hommes meilleurs ne se sont pas tellement portées sur les relations hommes-femmes, sur plus d'égalité entre les hommes et les femmes, par exemple une modification du Code civil ?

H. V. : Je n'ai pas de réponse. Pourtant, c'était humiliant de ne pas pouvoir emprunter sans l'autorisation du mari alors qu'on avait notre chéquier personnel. Même pour acheter un meuble à crédit, il fallait l'autorisation du mari. Je me souviens d'avoir voulu acheter un meuble à crédit et il fallait la signature de mon mari. J'ai dit : "mais c'est pour moi, c'est moi qui l'achète, avec ce que je gagne". Pour ouvrir un compte en banque, pour un tas de choses, il fallait la signature du mari. On avait l'impression d'archaïsme mais moi je n'ai pas été une femme militante, il ne m'est jamais venu à l'idée de dire : « c'est mauvais, il faut que je change cela et je vais participer au changement ». J'ai été assez nulle dans ce domaine là.

F. T. : La Résistance n'a pas tellement discuté ce domaine là ?

H. V. : Moi, pendant longtemps, j'ai pensé ne pas voir la Libération. Je pensais que c'était inévitable, nous allions être arrêtés, je serais prise et je ne participerais jamais à la suite. C'était une vue pessimiste des choses, cela m'a évité d'avoir peur et c'est déjà bien. Puisque cela devait inéluctablement arriver, je n'en avais pas peur. Finalement cela ne s'est pas produit, par chance, pour moi. Donc je n'envisageais pas l'avenir. [...]

Bibliographie
Pour plus d'informations sur le mouvement Défense de la France, on peut consulter : Olivier WIEVIORKA, Destins d'un mouvement de Résistance : Défense de la France, Seuil, 1995.

Pour citer cet article
Dominique VEILLON et Françoise Thébaud, "Hélène VIANNAY", Clio, numéro 1-1995, Résistances et Libérations France 1940-1945, [En ligne], mis en ligne le 01 janvier 2005.
URL : http://clio.revues.org/index530.html

22/01/2010
Auteur : Dominique VEILLON et Lien : Résistances et Libérations France 1940-1945

[Compléter l'article]

Hommage à Hélène Viannay

Née le 12 juillet 1917 à Paris (XIVe arrondissement), Hélène Mordkovitch rejoint très tôt les rangs de la Résistance. Occupant à la Sorbonne un poste d’assistante au laboratoire de géographie physique, elle évolue dans un milieu très patriote. C’est à cette période que l’idée lui vient de rédiger et de diffuser discrètement de petits tracts anti-allemands. Chargée par le professeur Lutaud des cours de cartographie, elle y rencontre un étudiant en philosophie, Philippe Viannay, qui partage avec elle le même refus de la défaite et la même volonté d’éveiller l'opinion. Leurs idées sur les moyens d’agir convergent et Hélène Mordkovitch s’associe à l’idée de Philippe Viannay de créer un journal clandestin. De septembre à décembre 1940, Hélène participe à la conception et à la diffusion de tracts dénonçant l’Occupation. Elle utilise pour cela sa position au laboratoire de géographie et organise la première impression du journal Défense de la France dans les caves de la Sorbonne, à partir du mois de février 1941. Hélène dispose d’une clé des lieux. Les séances d’impression durent parfois jusqu’à 5 heures du matin. À la différence de Philippe Viannay, Hélène est hostile à Pétain, rejette la Révolution nationale et adhère rapidement à de Gaulle. Si elle assure une grande part de la diffusion du journal clandestin, Hélène Mordkovitch n’a que très rarement participé à la rédaction des articles.
Jusqu’à la Libération, elle organise au sein du Comité directeur du mouvement les chaînes de diffusion du journal et des faux-papiers, ainsi que la liaison entre les ateliers.
En 1942, Hélène Mordkovitch et Philippe Viannay se marient. Un garçon, Pierre, naît le 14 juillet 1943.
Après la vague d’arrestations qui touche le mouvement le 20 juillet 1943, elle doit quitter en catastrophe la clinique où elle se trouve. Elle est recueillie un temps par Marie-Hélène Lefaucheux.
À la fin du mois de juin 1944, elle rejoint le maquis de Seine-et-Oise Nord (maquis de Ronquerolles) dirigé par Philippe Viannay, elle assure alors la liaison entre les différents secteurs et entre le maquis et Paris. Pendant l’absence de Philippe Viannay, blessé, elle assure la coordination des différents secteurs.
Jusqu’à la libération du secteur début septembre 1944, elle collabore aux prises de décisions de l’état-major du maquis.
Après guerre, Hélène Viannay et Philippe Viannay fondent ensemble l’école de voile des Glénans. Hélène Viannay en sera la déléguée générale jusqu’à son départ à la retraite.
Commandeur de la Légion d’honneur,
Hélène Viannay assurera, après la mort de Philippe Viannay, la présidence de l’association Défense de la France au sein de laquelle elle crée le prix "Philippe Viannay-Défense de la France".
Hélène Viannay nous a quittés le 25 décembre 2006.

07/03/2010
Auteur : Fabrice Bourrée (AER Lien : Lettre de la Fondation de la Résistance, 48

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Chronologie [Ajouter]
Cet article n'est pas encore renseigné par l'AJPN, mais n'hésitez pas à le faire afin de restituer à cette commune sa mémoire de la Seconde Guerre mondiale.


Témoignages, mémoires, thèses, recherches, exposés et travaux scolaires [Ajouter le votre]

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Etoile jaune: le silence du consistoire centrale , Mémoire ou thèse 7 pages, réalisation 2013
Auteur : Thierry Noël-Guitelman - terminal
Lorsque la 8e ordonnance allemande du 29 mai 1942 instaure l'étoile jaune en zone occupée, on peut s'attendre à la réaction du consistoire central. Cette étape ignoble de la répression antisémite succédait aux statuts des juifs d'octobre 1940 et juin 1941, aux recensements, aux rafles, aux décisions allemandes d'élimination des juifs de la vie économique, et au premier convoi de déportés pour Auschwitz du 27 mars 1942, le consistoire centrale ne protesta pas.


Liens externes [Ajouter un lien vers un article d'intérêt ou un site internet]
1 Juifs en psychiatrie sous l'Occupation. L'hospitalisation des Juifs en psychiatrie sous Vichy dans le département de la Seine (Par une recherche approfondie des archives hospitalières et départementales de la Seine, l'auteur opère une approche critique des dossiers concernant des personnes de confession juive internées à titre médical, parfois simplement préventif dans le contexte des risques et des suspicions propres à cette période. La pénurie alimentaire est confirmée, influant nettement sur la morbidité. Ce premier travail sera complété par un examen aussi exhaustif que possible des documents conservés pour amener une conclusion. )
2 Héros de Goussainville - ROMANET André (Héros de Goussainville - Page ROMANET André )
3 Notre Dame de Sion : les Justes (La première religieuse de Sion à recevoir ce titre en 1989 est Denise Paulin-Aguadich (Soeur Joséphine), qui, à l’époque de la guerre, était ancelle (en religion, fille qui voue sa vie au service de Dieu). Depuis, six autres sœurs de la congrégation, ainsi qu’un religieux de Notre-Dame de Sion ont reçu la même marque de reconnaissance à titre posthume. Ils ont agi à Grenoble, Paris, Anvers, Rome. L’action de ces religieuses et religieux qui ont sauvé des Juifs pendant la deuxième guerre mondiale mérite de ne pas être oubliée. Et il y en a d’autres, qui, même s’ils n’ont pas (encore ?) reçu de reconnaissance officielle, ont œuvré dans le même sens, chacun à leur place. )
4 L'histoire des Van Cleef et Arpels (Blog de Jean-Jacques Richard, très documenté. )
5 Résistance à la Mosquée de Paris : histoire ou fiction ? de Michel Renard (Le film Les hommes libres d'Ismël Ferroukhi (septembre 2011) est sympathique mais entretient des rapports assez lointains avec la vérité historique. Il est exact que le chanteur Selim (Simon) Halali fut sauvé par la délivrance de papiers attestant faussement de sa musulmanité. D'autres juifs furent probablement protégés par des membres de la Mosquée dans des conditions identiques.
Mais prétendre que la Mosquée de Paris a abrité et, plus encore, organisé un réseau de résistance pour sauver des juifs, ne repose sur aucun témoignage recueilli ni sur aucune archive réelle. Cela relève de l'imaginaire. )
6 La Mosquée de Paris a-t-elle sauvé des juifs entre 1940 et 1944 ? une enquête généreuse mais sans résultat de Michel Renard (Le journaliste au Figaro littéraire, Mohammed Aïssaoui, né en 1947, vient de publier un livre intitulé L’Étoile jaune et le Croissant (Gallimard, septembre 2012). Son point de départ est un étonnement : pourquoi parmi les 23 000 «justes parmi les nations» gravés sur le mémorial Yad Vashem, à Jérusalem, ne figure-t-il aucun nom arabe ou musulman ? )
7 Paroles et Mémoires des quartiers populaires. (Jacob Szmulewicz et son ami Étienne Raczymow ont répondu à des interviews pour la réalisation du film "Les garçons Ramponeau" de Patrice Spadoni, ou ils racontent leur vie et en particulier leurs actions en tant que résistants. On peut le retrouver sur le site Paroles et Mémoires des quartiers populaires. http://www.paroles-et-memoires.org/jan08/memoires.htm. (Auteur : Sylvia, Source : Canal Marches) )
8 Les grands entretiens : Simon Liwerant (Témoignage de Simon Liwerant est né en 1928. Son père Aron Liwerant, ouvrier maroquinier né à Varsovie, et sa mère Sara née Redler, seront arrêtés et déportés sans retour. )

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