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Département :
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(1944 - 1946) Préfet de la Seine (1892-1971)
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Paris 75000 Paris
Date de naissance: 1961
Profession: Agrégé d'histoire, professeur d'histoire contemporaine à l'Université Toulouse II-Le Mirail
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Histoire

CHÈRE MADEMOISELLE... ALICE FERRIÈRES ET LES ENFANTS DE MURAT, 1941-1944

"Chère Mademoiselle... Alice Ferrières et les enfants de Murat, 1941-1944", de Patrick Cabanel : une "Juste" au jour le jour
LE MONDE DES LIVRES | 08.04.10 |

Alice Ferrières. Ce nom vous est inconnu ? C'est normal. Il ne disait rien, non plus, au rabbin de Clermont-Ferrand, à qui cette protestante de 31 ans adressa, en mai 1941, la lettre suivante : "Monsieur le Rabbin, je me permets de vous écrire afin que vous sachiez toute l'indignation que nous sommes heureusement nombreux à ressentir au sujet du Statut des juifs en zone occupée. (...) Mes ancêtres ont subi les conséquences de la révocation de l'édit de Nantes en 1685 et les terribles dragonnades dont les Cévennes gardent encore le souvenir épouvanté. Le sacrifice de mes ancêtres et la fidélité à leur foi jusque dans leur sort ont permis à leurs descendants de vivre en paix. J'espère que les israélites n'attendront pas si longtemps le droit de prier selon leur coeur, car le Français a trop le goût de la liberté et le sentiment de la justice pour supporter sans protester un tel mépris de la personne humaine. (...) Je vous serais reconnaissante si vous vouliez bien me mettre en relation avec un organisme (d'entraide) ou avec une famille, afin que je puisse soulager dans la mesure du possible quelques misères matérielles et morales - jusqu'à ce que l'épreuve soit terminée."

Le rabbin ne répondit pas. Mais il transmit immédiatement la lettre à ses amis du Comité d'assistance aux réfugiés, une association fondée en 1936 pour aider les juifs allemands victimes de persécutions. Là, c'est une dénommée Mme Bloch qui se chargea de prendre la plume. D'abord pour dire sa gratitude envers la bienveillante inconnue ("Combien cela fait du bien de voir que nous ne sommes pas seuls dans les terribles épreuves que nous traversons..."). Puis pour lui parler du cas d'un certain M. Stilling. Ce brave monsieur, expliquait Mme Bloch, était autrefois traducteur à l'agence Havas. Protestant mais d'"ascendance juive" - donc visé par les lois antisémites de Vichy -, il avait été licencié du jour au lendemain et, depuis, était sans ressources. Alors, suggérait Mme Bloch, "peut-être connaîtriez-vous des personnes auxquelles cet homme instruit, fils d'un célèbre professeur d'université, pourrait faire des travaux de traduction".

Alice Ferrières ne tarda pas à réagir. Une semaine plus tard, elle informait sa correspondante qu'elle avait écrit à M. Stilling et déjà contacté deux personnes susceptibles de l'aider. Elle terminait en réitérant sa proposition : "Je serai toujours à votre entière disposition, si éventuellement je puis collaborer avec vous pour trouver du travail à ceux qui sont brusquement privés de leur gagne-pain."

Belle-soeur du philosophe résistant Jean Cavaillès (1903-1944), Alice Ferrières (1909-1988) fut, en 1964, la première femme en France à être reconnue comme "Juste parmi les nations" par le Mémorial de Yad Vashem. Depuis, quelque 3 000 Français ont été ajoutés à la liste, qui comprend au total un peu plus de 22 000 noms. Curieusement, pourtant, leurs faits et gestes restent mal connus. "L'absence d'une histoire des Justes mutile l'histoire de la Shoah", affirmait ainsi Lucien Lazare dans un entretien accordé au Monde, en 2003, lors de la parution de son Dictionnaire des Justes de France (Fayard/Yad Vashem). A l'adresse des chercheurs, il ajoutait qu'un "immense travail" restait à faire sur les milliers d'anonymes qui, dans les campagnes, avaient risqué leur vie pour sauver des juifs.

Héros ordinaires

Nommée en 1938 professeur de mathématiques à Murat, un petit bourg du Cantal, Alice Ferrières appartient à ces héros ordinaires qui contribuèrent à faire en sorte que trois quarts des juifs de France aient survécu à la Shoah. Or ce qui est exceptionnel, dans son cas, est que nous savons tout, absolument tout, de son activité. Parce qu'elle a conservé les dizaines de lettres qu'elle a reçues de ceux qu'elle appelait affectueusement ses "protégés". Parce qu'elle a gardé les doubles de toutes celles qu'elle leur a adressées. Parce qu'elle a constitué des fiches pour chacun d'eux. Et enfin parce qu'elle a tenu un journal d'une précision hallucinante, qui permet de suivre ses faits et gestes au jour le jour, parfois même à l'heure près. Ce sont tous ces documents, conservés aujourd'hui au Mémorial de la Shoah, à Paris, que vient d'éditer avec un soin de bénédictin l'historien Patrick Cabanel.

Ces pages, poignantes d'authenticité, forment un témoignage sans équivalent sur ce que voulait dire, concrètement, aider les juifs sous l'Occupation. Une chose, par exemple, est de savoir que des colis furent envoyés dans les camps d'internement. Une autre est de voir comment se noue, par voie épistolaire, une relation presque filiale entre un vieux juif polonais prisonnier dans un camp de Haute-Garonne et sa bienfaitrice du Cantal. De lire le premier supplier la seconde de lui "envoyer au plus vite du fromage, du chocolat, de la marmelade et de la graisse" parce qu'il meurt de faim. D'apprendre comment celle-ci a convaincu ses amies de se priver de leur ration de savon au profit du malheureux. Et de tomber, pour finir, sur la lettre du directeur du camp expliquant sèchement à la jeune femme qu'il est désormais inutile d'envoyer des colis dans la mesure où le "nommé Goldschlag Moses" vient de partir pour une "destination inconnue"...

Il en va de même pour les enfants cachés. Aucun livre d'histoire ne peut restituer, comme ces textes écrits sur le vif, le mélange d'angoisse, de tristesse et d'apaisement que pouvaient ressentir des parents séparés de leurs petits mais rassurés à l'idée de les savoir en sûreté à la campagne. Aucune étude rédigée après coup ne peut en dire autant sur la détresse de certains enfants cachés que cette lettre d'une fillette juive suppliant "Mademoiselle Ferrières" de la sortir de l'internat religieux où on l'oblige à "prier toute la journée". Et seule une plongée dans les archives de l'époque permet de comprendre le jeu parfois sordide des familles d'accueil, avec lesquelles la jeune femme bataillait quand elles montaient trop les prix pour prendre en pension un gamin traqué par la police...

"Toutes ces persécutions n'auront qu'un temps, j'en suis convaincue. (...) D'ici là, il s'agit de vivre, de garder son courage, de se cramponner", écrivait Alice Ferrières à l'été 1941. Au-delà des colis envoyés aux affamés, de l'argent donné aux plus démunis et des chocolats chauds offerts à ses protégés le dimanche après-midi, c'est aussi cette inébranlable foi en l'avenir, cette confiance confinant à l'inconscience, qui rend cette femme si attachante. "Il en faudrait beaucoup des comme elle", confia à l'une de ses amies un rabbin à qui elle venait de rendre visite, en juin 1942.

CHÈRE MADEMOISELLE... ALICE FERRIÈRES ET LES ENFANTS DE MURAT, 1941-1944 de Patrick Cabanel.
Préface de Mona Ozouf.
Calmann-Lévy- Mémorial de la Shoah, 558 p., 26,90 €.

09/04/2010
Auteur : Thomas Wieder Lien : Le Monde

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Etoile jaune: le silence du consistoire centrale , Mémoire ou thèse 7 pages, réalisation 2013
Auteur : Thierry Noël-Guitelman - terminal
Lorsque la 8e ordonnance allemande du 29 mai 1942 instaure l'étoile jaune en zone occupée, on peut s'attendre à la réaction du consistoire central. Cette étape ignoble de la répression antisémite succédait aux statuts des juifs d'octobre 1940 et juin 1941, aux recensements, aux rafles, aux décisions allemandes d'élimination des juifs de la vie économique, et au premier convoi de déportés pour Auschwitz du 27 mars 1942, le consistoire centrale ne protesta pas.


Liens externes [Ajouter un lien vers un article d'intérêt ou un site internet]
1 Juifs en psychiatrie sous l'Occupation. L'hospitalisation des Juifs en psychiatrie sous Vichy dans le département de la Seine (Par une recherche approfondie des archives hospitalières et départementales de la Seine, l'auteur opère une approche critique des dossiers concernant des personnes de confession juive internées à titre médical, parfois simplement préventif dans le contexte des risques et des suspicions propres à cette période. La pénurie alimentaire est confirmée, influant nettement sur la morbidité. Ce premier travail sera complété par un examen aussi exhaustif que possible des documents conservés pour amener une conclusion. )
2 Héros de Goussainville - ROMANET André (Héros de Goussainville - Page ROMANET André )
3 Notre Dame de Sion : les Justes (La première religieuse de Sion à recevoir ce titre en 1989 est Denise Paulin-Aguadich (Soeur Joséphine), qui, à l’époque de la guerre, était ancelle (en religion, fille qui voue sa vie au service de Dieu). Depuis, six autres sœurs de la congrégation, ainsi qu’un religieux de Notre-Dame de Sion ont reçu la même marque de reconnaissance à titre posthume. Ils ont agi à Grenoble, Paris, Anvers, Rome. L’action de ces religieuses et religieux qui ont sauvé des Juifs pendant la deuxième guerre mondiale mérite de ne pas être oubliée. Et il y en a d’autres, qui, même s’ils n’ont pas (encore ?) reçu de reconnaissance officielle, ont œuvré dans le même sens, chacun à leur place. )
4 L'histoire des Van Cleef et Arpels (Blog de Jean-Jacques Richard, très documenté. )
5 Résistance à la Mosquée de Paris : histoire ou fiction ? de Michel Renard (Le film Les hommes libres d'Ismël Ferroukhi (septembre 2011) est sympathique mais entretient des rapports assez lointains avec la vérité historique. Il est exact que le chanteur Selim (Simon) Halali fut sauvé par la délivrance de papiers attestant faussement de sa musulmanité. D'autres juifs furent probablement protégés par des membres de la Mosquée dans des conditions identiques.
Mais prétendre que la Mosquée de Paris a abrité et, plus encore, organisé un réseau de résistance pour sauver des juifs, ne repose sur aucun témoignage recueilli ni sur aucune archive réelle. Cela relève de l'imaginaire. )
6 La Mosquée de Paris a-t-elle sauvé des juifs entre 1940 et 1944 ? une enquête généreuse mais sans résultat de Michel Renard (Le journaliste au Figaro littéraire, Mohammed Aïssaoui, né en 1947, vient de publier un livre intitulé L’Étoile jaune et le Croissant (Gallimard, septembre 2012). Son point de départ est un étonnement : pourquoi parmi les 23 000 «justes parmi les nations» gravés sur le mémorial Yad Vashem, à Jérusalem, ne figure-t-il aucun nom arabe ou musulman ? )
7 Paroles et Mémoires des quartiers populaires. (Jacob Szmulewicz et son ami Étienne Raczymow ont répondu à des interviews pour la réalisation du film "Les garçons Ramponeau" de Patrice Spadoni, ou ils racontent leur vie et en particulier leurs actions en tant que résistants. On peut le retrouver sur le site Paroles et Mémoires des quartiers populaires. http://www.paroles-et-memoires.org/jan08/memoires.htm. (Auteur : Sylvia, Source : Canal Marches) )
8 Les grands entretiens : Simon Liwerant (Témoignage de Simon Liwerant est né en 1928. Son père Aron Liwerant, ouvrier maroquinier né à Varsovie, et sa mère Sara née Redler, seront arrêtés et déportés sans retour. )

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